MÉMOIRE EXPLICATIF DU ZODIAQUE CHRONOLOGIQUE ET MYTHOLOGIQUE, par Charles-François DUPUIS

Le Zodiaque que nous donnons aujourd’hui au public a pour base principale l’astronomie des Orientaux et la précession des équinoxes et des solstices. Tout le monde connaît la division qui a été faite du cercle que paraît décrire le Soleil durant sa révolution annuelle à travers les étoiles semées sur le Zodiaque. On l’a partagée en douze parties égales qu’on appelle signes parce qu’à chacune fut affectée une image sous laquelle les diverses étoiles furent groupées. Originairement cette image était véritablement un signe, une indication des phénomènes célestes ou terrestres, des opérations agricoles qui avaient lieu quand le Soleil traversait l'une de ces divisions. Les uns les ont appelées maisons, demeures du Soleil, hôtelleries, forts, tours, etc. On fit pour la Lune ce qu’on avait fait pour le Soleil. On lui assigna aussi ses demeures, ses maisons, mais on en porta le nombre tantôt à 27, tantôt à 28. Chacune eut son nom et fut souvent désignée par un symbole particulier. Les Persans les appellent des kordehs, les Arabes des maisons, les Chinois des sou, les Indiens des nakshatras.



Le Zodiaque que nous donnons aujourd’hui au public, et dont nous expliquons ici les diverses parties en indiquant l’usage qu’on en peut faire pour l’étude de la chronologie et de la mythologie, est un ouvrage absolument neuf, qui manquait à la science de l’antiquité. Il a pour base principale l’astronomie des Orientaux et la précession des équinoxes et des solstices. En conséquence, il suppose, de la part du lecteur, quelques notions, au moins élémentaires, dans cette partie des connaissances humaines. Voilà pourquoi nous n’entrerons pas dans les explications de détail sur la sphère. Cependant, comme cet ouvrage est fait moins pour les astronomes que pour les gens de lettres, nous donnerons à notre théorie plus de développement que si nous n’écrivions que pour les astronomes.

Tout le monde connaît la division qui a été faite du cercle que paraît décrire le Soleil durant sa révolution annuelle à travers les divers points fixes ou étoiles semées sur une bande circulaire de 17° environ de largeur, qu’on nomme Zodiaque. On l’a partagée en douze parties égales, chacune de 30°, qu’on appelle ordinairement signes parce qu’à chacune fut affectée une image sous laquelle furent groupées les diverses étoiles que comprenait cette division. Originairement cette image était véritablement un signe [1] ou une indication des phénomènes célestes ou terrestres, et des opérations agricoles qui avaient tous les ans lieu quand le Soleil se trouvait dans une de ces divisions. C’était une espèce de calendrier pittoresque, dont les rapports avec les choses indiquées ont changé après un certain laps de temps, par l’effet d’un mouvement rétrograde et d’un déplacement lent dont nous parlerons bientôt, et dont nous avons parlé plus au long dans notre mémoire sur l’origine du Zodiaque [2] et des constellations.

On a donné encore d’autres noms à ces divisions [3]; les uns les ont appelées des maisons, des demeures du Soleil, des hôtelleries, des forts, des tours, etc.

On fit pour la Lune ce qu’on avait fait pour le Soleil. On lui assigna aussi ses demeures, ses maisons, mais on en porta le nombre tantôt à 27, tantôt à 28, nombre à peu près égal à celui des jours qu’elle met à achever sa révolution ou à revenir au même point du ciel, à la même étoile, d’où elle était partie au commencement du mois. La Lune s’avançant chaque jour d’environ 13° dans sa carrière, chaque jour elle fixait dans les cieux les divisions de son mouvement périodique pendant le mois. Chacune de ces divisions eut son nom et fut souvent désignée par un symbole particulier, comme on le voit dans ce tableau. Les Persans les appellent des kordehs, les Arabes des maisons, des stations, les Chinois des sou, les Indiens des natchtras ou natchtrons.

Ce sont ces maisons lunaires, dont les noms se trouvent dans les livres d’astronomie de différents peuples de l’Orient, que nous avons réunies dans un seul tableau comparatif afin d’obtenir des résultats que l’on verra bientôt

Nous avons mis au centre du tableau le Soleil, qu’entoure un cercle représentant l’orbite de la Terre, centre elle-même de l’orbite de la Lune. Plus loin, nous avons tracé un cercle qui embrasse ceux-ci et que nous avons divisé en 28 parties, ou cases, d’un égal nombre de degrés, ce sont les kordehs des Persans. Chacun est sous son numéro et sous son nom. Le point initial de la division est sur le colure ou sur la ligne horizontale qui représente la section du plan de l’écliptique par un des colures et qui passe d’un côté par la tête du Bélier et de l’autre par les pieds de la Vierge. Nous l’avons marqué de la lettre A.

Le signe du Bélier
La seconde bande circulaire, qui entoure celle-ci et qui est cotée B, contient les 28 stations de la Lune avec les noms que leur donnent les Arabes et les étoiles qui sont comprises dans chaque station.

La troisième ceinture, ou bande circulaire, cotée C, renferme les 28 sou des Chinois, avec leurs noms et les étoiles qu’ils contiennent. On y a marqué aussi les caractères des sept planètes distribuées dans les 28 sou suivant l’ordre qu’elles ont dans la semaine, dont chacun des jours fut consacré à une planète, par les raisons que nous avons données ailleurs [4].

Nous avons aussi indiqué dans plusieurs sou certaines désignations que leur donnent les Chinois, telles que la Corne, le Tronc céleste, le Char du ciel, le Grand feu, la Barque, le Passage de rivière, le Palais céleste. On les trouve sous les numéros 1, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 13.

La quatrième bande circulaire, cotée D, la plus large de toutes, contient les 27 natchtrons des Indiens, avec leurs noms et les variantes, les étoiles qui appartiennent à chaque natchtron, les divers emblèmes qui les désignent, avec les quadrupèdes, les oiseaux et les plantes qui leur sont affectés, et avec le caractère de bon ou de mauvais qu’on donne à chaque natchtron.

La cinquième bande, marquée E, est divisée en douze parties chacune de 30°. Elle contient les noms des mois indiens, avec leurs variantes et leurs altérations.

La sixième et dernière bande, qui embrasse toutes les autres, également divisée en douze parties, contient les noms des mois chinois et égyptiens qui correspondent à ceux des Indiens. On verra bientôt l’usage que nous en ferons.

Tous ces divers systèmes lunaires sont renfermés dans un cercle gradué et divisé en douze grandes parties ou signes. Ce sont les douze signes du Zodiaque avec leurs images et avec les caractères abrégés des planètes qui ont leur domicile dans chaque signe. Nous y avons joint les noms de chacun de ces signes chez les Indiens.

Nous passons maintenant aux résultats que nous donne ce tableau comparatif.

On remarque d’abord que ces divers systèmes lunaires, tirés de l’astronomie de différents peuples, s’accordent tous à placer dans les cases correspondantes à peu près les mêmes étoiles. Il suffit, pour s’en assurer, de comparer les étoiles désignées dans la même case de la division de chaque peuple.

On remarque aussi qu’ils ont pris tous, excepté les Chinois, les mêmes étoiles pour point initial de la division, à savoir celles de la tête du Bélier.

Les Chinois, au contraire, ont fixé le point initial dans la partie du ciel diamétralement opposée, vers les pieds de la Vierge et près de l’Épi. Cette différence, qui n’influe en rien sur la correspondance des cases, et qui ne tombe que sur les numéros, vient peut-être de ce que les uns ont pris pour point initial le lieu de la nouvelle lune et les autres celui de la pleine lune, ou que les uns ont commencé la division par le solstice d’été et les autres par le solstice d’hiver, ou bien encore les uns par l’équinoxe du printemps et les autres par celui d’automne. Du reste tout s’accorde et correspond, et l’Épi, par exemple, qui est dans la première case de la division chinoise, se trouve dans la quatorzième des divisions indienne, arabe et persane, c’est-à-dire, dans la case diamétralement opposée, ou dans celle où était le solstice d’hiver quand le solstice d’été se trouvait près l’Épi. La correspondance des étoiles des cases est absolument la même, il n’y a de différence que la correspondance numérique.

On remarque quelquefois de l’analogie entre les noms des diverses maisons chez les différents peuples. Ainsi Pié, qui est le dix-neuvième sou chinois, correspond au quatrième kordeh persan, qui s’appelle Pehé et qui renferme les mêmes étoiles : ce sont les Hyades.

La quinzième maison de la division chinoise s’appelle Quei, dont la prononciation s’éloigne peu de Keht qui lui correspond chez les Persans et qui est le vingt-septième kordeh.

Les Chinois appellent leur première constellation lunaire Kio, ou la Corne, et les autres divisions arabe, persane, indienne commencent aussi par une corne, par celle du Bélier, opposée à Kio ou au premier sou chinois, etc.

On reconnaît aisément dans la dix-septième maison lunaire de la division des Arabes, Al-Kesil ou Kelil, qui comprend les étoiles du Scorpion, la constellation Kesil du livre de Job, qui lui oppose Al Kima ou les Pléiades, astres de l’équinoxe de printemps quand le Scorpion répondait à l’équinoxe d’automne, comme dans le monument de Mithra. Ce sont les constellations Fang et Mao de la division chinoise, les unes sont les étoiles du front du Scorpion et les autres les Pléiades, appelées aussi al-Thurayya par les Arabes.

Une remarque qui s’applique particulièrement aux Chinois, c’est la correspondance de chaque planète avec les mêmes jours du mois et avec les mêmes constellations, en sorte que le dimanche, par exemple, se trouve toujours répondre aux constellations Mao, Sing, Fang et Heu, et ainsi des autres. On donna même, dit le père Gaubil [5], à chaque jour du mois le nom d’une des vingt-huit constellations. Le mois lunaire se trouva donc divisé en quatre parties égales par la semaine, qui ne divise pas de même également nos mois de 30 et 31 jours.

La première partie de la division [6] s’appela l’arc supérieur. Une observation qui peut nous conduire à l’époque à laquelle cette distribution planétaire fut admise en Chine, c’est de voir que les quatre constellations affectées au dimanche ou au Soleil, sont celles où l’on fixait les quatre points de partage dans la division de l’année solaire sous Yaô, c’est-à-dire le commencement de chaque saison, quatre points où le calendrier d’Yaô fixe le lieu des colures. Il est assez naturel de penser que les Chinois, donnant au Soleil, dans leur calendrier, la prééminence qu’il a sur les planètes, l’auront primitivement mis à la tête de chaque division de l’année par saison et de la période hebdomadaire : ainsi le jour du Soleil fut placé soit dans la constellation Mao, parce que l’équinoxe de printemps s’y trouvait, soit dans la constellation Heu, parce que, sous Yaô, c’était là qu’arrivait le solstice d’hiver, époque à laquelle les Chinois commençaient leur année [7], car tout est symétrique dans ce système.

Cette période planétaire, que l’on croit être une invention des Égyptiens, se retrouve chez les Indiens, chez les Siamois et chez beaucoup d’autres peuples de l’Orient. Elle a passé plus tard dans l’Occident et dans le Nord. Le premier acte de Constantin, après sa conversion, fut de faire disparaître ces traces du paganisme [8]. Il fit substituer au lunæ dies et au martis dies, etc., feria prima, feria secunda, ou primedi, duodi, etc. L’Église a conservé pour elle ces nouvelles dénominations et proscrit de son calendrier le nom des planètes. Le nom de dies solis, ou jour du Soleil, est longtemps resté au dimanche chez certains écrivains.

Si nous jetons un coup d’œil sur le système des maisons lunaires chez les Indiens, il ne nous sera pas difficile d’apercevoir d’après quels principes il a été composé et quelles conséquences on peut en tirer.

On remarquera d’abord que plusieurs des animaux, soit quadrupèdes, soit oiseaux, affectés à tel ou tel natchtron, sont des paranatellons ou des constellations soit zodiacales, soit extra zodiacales, qui se lient à ce natchtron, soit par leur lever, soit par leur coucher, soit par leur passage au méridien supérieur, et conséquemment, que beaucoup d’images célestes qui sont dans nos sphères existaient déjà dans les sphères orientales d’où ce système lunaire est emprunté, et qu’au lieu de nommer les étoiles, on a nommé les animaux ou les parties d’animaux célestes qui fixaient les limites des maisons lunaires.

Ainsi, le Cheval est affecté au premier natchtron parce que le cheval du Centaure, placé sous la Balance, se lève en aspect avec ce natchtron ou qu’il est son paranatellon. Persée, qui monte avec lui, porte aussi le nom d’Eques. Peut-être aussi est-ce le Pégase car Achille Tatius [9] nous dit que lorsque le Soleil entre au Bélier (c’est le premier natchtron), Pégase, ou le Cheval céleste, le précède.

Au troisième natchtron, Krittikā, on affecte la Chèvre. Cette constellation est effectivement placée sur le troisième natchtron, ou sur les Pléiades, dans les bras du Cocher. Nous la trouvons aussi là dans le Zodiaque de Dendérah, accolée avec le Chien céleste [10], comme nous l’avons remarqué dans nos observations sur ce Zodiaque.

Au coucher du quatrième natchtron, Rohinī, se lève le Serpent du Serpentaire, que nous trouvons dans le Zodiaque de Dendérah et dans celui de Kirker, comme paranatellon du Taureau. On verra que c’est la Couleuvre qui est affectée à ce natchtron dans notre tableau.

Sous le sixième natchtron, qui répond aux Gémeaux, on a casé le Chien, parce que le grand Chien passe au méridien avec ce natchtron et détermine par-là dans les cieux sa position. Le Loup, appelé Tigre dans les sphères orientales [11], fixe aussi, par son passage au méridien, celui du quatorzième natchtron. On a affecté le Tigre à ce natchtron ; il se lie aussi au seizième natchtron, par un autre aspect.

On a affecté la Biche au dix-septième natchtron, qui répond aux premières étoiles du Scorpion. C’est le coucher de Cassiopée à la place de laquelle les sphères orientales peignaient une Biche. C’est même par là que nous avons expliqué le quatrième travail d’Hercule, ou sa victoire sur la biche aux pieds d’airain. Ce travail, dans notre explication, dont ceci est une confirmation, tombe également sous le Scorpion [12] comme ici. Firmicus nomme le Cerf [13], qu’il donne pour paranatellon aux Poissons. La sphère barbare y met Cassiopée.

Sous le dix-neuvième natchtron, qui répond au Sagittaire, on a placé une Chienne. C’est Procyon, ou le petit Chien, qui se couche au lever de ce natchtron. C’est aussi par cet aspect, que nous avons expliqué dans nos observations sur le Zodiaque de Dendérah, la face de chien unie à celle d’homme et donnée au Sagittaire dans ce monument astrologique. Firmicus, d’ailleurs, place in parte sinistra Sagittarii, Canem [14].

C’est ainsi qu’il met le Scorpion entre le Renard et le Cynocéphale, tel qu’il est placé dans le Zodiaque de Dendérah.

Sous les natchtrons vingt-trois et vingt-cinq on trouve le Lion et la Lionne. Ces natchtrons sont compris dans la constellation du Verseau, en aspect duquel se lève le Lion.

Le Bouvier, ou le conducteur des vaches d’Icare, monte en aspect avec le vingt-sixième natchtron, qui répond aux Poissons. On lui a affecté une vache.

Il y a quelques animaux qui ne se trouvent pas dans nos sphères, tels que l’Éléphant, le Singe. Il y a beaucoup d’apparence qu’ils étaient dans la sphère orientale et qu’ils devaient correspondre aux natchtrons sous lesquels ils sont ici placés. Suivant le père Souciet, l’Éléphant et d’autres symboles astronomiques font partie des constellations orientales [15], comme nous l’avons nous-mêmes déjà observé dans notre grand ouvrage [16].

Dans la Sphère persique [17], que nous avons extraite de Ben Ezra, on voit au troisième décan des Gémeaux la figure du Singe. Or les Gémeaux sont en aspect d’opposition avec la fin du Sagittaire, où est le vingtième natchtron, auquel est affecté ici le Singe.

On le retrouve encore au troisième décan de la Vierge, dans la Sphère barbare [18], Humérus Simiæ australis, pars pectoris ejus.

Dans le vingt-deuxième natchtron, répondant au Capricorne, on a placé la Guenon. Dans la Sphère persique [19], on lit au premier décan du Capricorne : Corpus Simiæ, caput ejus. Et au troisième décan : Finis Simiæ.

On remarque aussi la forme d’un corps d’éléphant sous le troisième décan du Taureau et au premier du Cancer, dans la Sphère indienne [20], ce qui prouve évidemment que ces figures appartenaient aux Sphères orientales.

On pourrait faire les mêmes remarques sur plusieurs oiseaux affectés aux natchtrons.

Ainsi, on a affecté le Corbeau au vingt-quatrième natchtron qui répond aux étoiles de la constellation du Verseau, parce que le Corbeau céleste, placé sur l’Hydre, se couche au lever de ce natchtron et fait par-là fonction de paranatellon, comme il est paranatellon du Lion au troisième décan de la Sphère persique [21], car cette dénomination fut donnée autant aux astres qui se couchent qu’à ceux qui se lèvent, soit avec un signe du Zodiaque, soit avec une partie de signe, soit décan, soit natchtron. On l’a même étendue jusqu’aux passages au méridien.

Au coucher du septième natchtron, répondant aux Gémeaux, se lève le Cygne. C’est même cet aspect qui a donné lieu à la fiction de la métamorphose de Jupiter en Cygne, père des deux gémeaux. On a affecté le Cygne à ce natchtron.

Le passage au méridien des dixième et onzième natchtrons, qui répondent au Lion, est marqué par le lever du Vultur ou Falco, qui porte la Lyre. On y a placé le Milan, oiseau de proie.

Le passage au méridien du treizième natchtron, répondant au milieu de la Vierge, est marqué par le lever de l’Aigle. On a affecté l’Aigle à ce natchtron.

Il est encore beaucoup d’autres oiseaux qui manquent à nos sphères, comme ils manquent aussi à notre tableau.

On pourrait, jusqu’à un certain point, faire le même essai sur les symboles ou emblèmes affectés à chacun des natchtrons.

Par exemple, le harpé, instrument tranchant, ou l’épée flamboyante que tient Persée, se couche avec le troisième natchtron, Krittikā. On a placé sous ce natchtron un rasoir et une flamme.

Nous avons dit plus haut qu’on avait affecté au sixième natchtron Ārdrā, le Chien, et que c’était l’animal céleste appelé le Grand chien, qui renferme la plus belle, la plus brillante étoile du ciel, Sirius. On a, par cette raison, placé pour symbole de ce natchtron une étoile brillante et une pierre précieuse. On sait que Sirius brille de mille couleurs, comme la pierre précieuse.

Avec le septième natchtron, qui répond à la fin de la constellation des Gémeaux, monte l’Arc du Sagittaire. On a donné à ce natchtron l’arc pour emblème.

Au coucher du huitième natchtron, qui répond aux premières étoiles du Cancer, monte la Flèche, constellation. On a donné à ce natchtron pour symbole la flèche.

Avec le natchtron suivant, ou avec le neuvième, monte la queue du Petit chien. On lui a donné pour symbole une queue de chien.

Sous le treizième natchtron, Hasta, marqué par cinq étoiles près la main de la Vierge, on a mis pour symbole une main parce que c’est effectivement cette partie de la constellation de la Vierge qui est comprise dans ce natchtron.

Sous le quatorzième natchtron, près les pieds de la Vierge, on a placé pour emblème une perle parce qu’effectivement avec les pieds de la Vierge se lève la plus brillante étoile de la Couronne boréale. Elle est appelée Margarita ou la Perle [22], comme on peut le voir dans notre grand ouvrage que nous ne citons souvent que parce qu’on y trouve les diverses dénominations des étoiles, les différentes sphères et les autorités dont nous nous appuyons et que nous ne pouvons rappeler toutes ici.

Sous le dix-septième natchtron, qui comprend les étoiles de la constellation du Scorpion, sur laquelle est le Serpentaire et son serpent, on a mis pour emblème le serpent.

Au coucher du dix-huitième natchtron se lève la tête de la Grande ourse. On y a placé pour symbole une tête d’ours.

Au lever du dix-neuvième natchtron, qui répond à l’extrémité de la queue du Scorpion, passe au méridien la queue du Lion qui, par ce passage, fixe le lever de ce natchtron. On y a mis pour emblème une queue de lion.

Sous le vingt-deuxième natchtron, on a mis pour symbole le pied de Vishnu. C’est le nom que l’on donne aux étoiles de l’Aigle, comprises dans le natchtron Abhijit. On y a mis aussi la Flèche, constellation qui tient à celle de l’Aigle.

Planisphère égyptien des Paranatellons, publié dans l'Atlas de l'Origine de tous les cultes de Charles-François Dupuis
Le passage au méridien de la Couronne australe, qui est un cercle d’étoiles placé entre l’Autel et le Sagittaire, fixe le lever du vingt-quatrième natchtron qui répond au Verseau. On donne à ce natchtron pour symbole un cercle d’étoiles et un joyau circulaire.

Le lever du vingt-cinquième natchtron est annoncé par le passage de la tête du Sagittaire au méridien. Cette tête, dans le Zodiaque de Dendérah, a une double face. Ce natchtron a aussi pour emblème une tète à deux faces.

Les symboles des deux derniers natchtrons sont un fléau de balance et un poisson. Le Poisson fait partie de la constellation du Zodiaque à laquelle répond ce natchtron. C’est le Poisson Boréal, placé sous Andromède.

Quant au fléau de balance, il peut désigner les premières étoiles des pieds de la Vierge, après lesquelles monte la Balance et qui se lèvent au coucher des Poissons, avec les premières étoiles du Bélier.

Si cela est, ce sera encore une nouvelle preuve de l’antiquité de cette image céleste qu’à tort on a prétendu être une invention moderne. On trouvera dans notre mémoire sur l’origine des constellations [23] et dans nos observations sur le Zodiaque égyptien trouvé à Dendérah, les preuves que nous employons pour réfuter cette fausse assertion.

On vient de voir, par l’examen et l’analyse que nous venons de faire du cortège symbolique qui accompagne les vingt-sept natchtrons des Indiens, qu’il a pour base la théorie des paranatellons, qui sert aussi de base à nos explications de la mythologie astronomique, comme elle en sert à toutes les descriptions de la sphère que nous ont laissées les anciens et à leurs calendriers, que nous avons fait imprimer dans notre grand ouvrage [24].

Ce cortège astrologique, composé de quadrupèdes, de reptiles, d’oiseaux, de plantes, etc., donné par les Indiens aux vingt-sept natchtrons, a été imité par les Arabes qui en ont aussi donné un d’une espèce à peu près pareille aux douze maisons du Soleil [25]. Mais ils l’ont tiré d’une autre théorie, de celle des influences. Nous avons fait imprimer ce tableau dans notre ouvrage [26].

Frontispice de "L'origine des cultes"
de C.-F. Dupuis
Si nous ne trouvons rien de semblable dans la série des vingt-huit sou chez les Chinois, des kordehs chez les Perses et des maisons lunaires chez les Arabes, c’est sans doute parce que les monuments de leur astrologie que nous avons sont incomplets.

Quant aux Égyptiens, Pococke a trouvé à Akmim une espèce de Zodiaque formé de plusieurs cercles concentriques ; on remarque douze oiseaux dans le premier. Dans celui de Bianchini, que nous avons fait graver [27], on y voit plusieurs quadrupèdes. Ainsi les douze maisons du Soleil ont eu leur cortège symbolique, comme les vingt-huit maisons de la Lune l’ont chez les Indiens.

Nous sommes donc assurés que les deux divisions, tant celle des maisons du Soleil que celle des maisons de la Lune, existaient simultanément puisque les images et les animaux symboliques des natchtrons sont souvent empruntés des animaux du Zodiaque, tels la queue du Lion, la main de la Vierge, etc.

C’est surtout chez les Arabes que ces rapports des maisons lunaires avec les constellations du Zodiaque sont sensibles puisque les noms de ces maisons sont souvent tirés des parties de l’animal du Zodiaque auquel les étoiles correspondent. Telle la première station de la Lune appelée, par Abenragel, Râs-al-Hamel, tête du Bélier, la deuxième el Batn ou le ventre, la dix-huitième Calb el Akrab, etc., cœur du Scorpion.

C’est ce qui doit faire rejeter l’opinion de MM. Bailly et le Gentil [28] qui ont cru que la division lunaire était la plus ancienne parce qu’elle était sans figures et marquée seulement par des lignes tirées dans le ciel et qui unissaient entre elles diverses étoiles. On ne tira simplement que des lignes parce que les catastérismes existaient déjà et que les étoiles avaient été groupées sous des images pour les besoins de l’astronomie solaire, celle qui règle l’ordre des saisons. Les lignes marquaient les distances, les rapports des maisons avec les étoiles déjà distribuées en constellations ; les symboles, ainsi que les animaux qu’on leur affecta, désignaient les divers animaux ou parties d’animaux célestes que ces lignes renfermaient. Si l’on devait admettre une antériorité, elle serait tout entière à l’avantage de l’astronomie solaire et des images symboliques connues encore aujourd’hui sous le nom de constellations.

L’origine des dénominations données aux mois indiens et la comparaison qu’on peut en faire avec celle des mois chinois et égyptiens peut aussi donner lieu à plusieurs observations.

D’abord, on remarque que les mois chez les Indiens ne prennent pas leur nom des signes ou des constellations que le Soleil parcourt dans ce mois, ni des natchtrons où la Lune se renouvelle, mais d’un des natchtrons opposés, c’est-à-dire d’un natchtron dans lequel la Lune du mois est pleine ou dont elle est voisine dans son plein. En voici un exemple : le premier mois indien s’appelle Chitrā et Chitteré. Le Soleil, durant ce mois, parcourt les étoiles de la constellation du Bélier, Mesha ou les natchtrons Ashvinī, Bharanī et un tiers environ de Krittikā. Ce n’est ni des étoiles du Bélier, Mesha, ni des natchtrons Ashvinī, Bharanī et Krittikā que ce mois emprunte son nom mais du quatorzième natchtron qui leur est diamétralement opposé ; il s’appelle Chitrā et Chitteré, comme le natchtron dans lequel la Lune de ce mois est pleine. On peut faire le même essai sur les autres mois. Par exemple, le troisième natchtron, Krittikā, qui ne donne point son nom à ce mois ni au suivant, qui sont les premiers mois du printemps où le Soleil s’unit aux Pléiades, donne son nom à un mois d’automne, au huitième mois, dans lequel la Lune est pleine dans le natchtron Krittikā et se trouve près des Pléiades, appelées Krittikā . On peut s’assurer que tous les autres mois empruntent de même leurs noms d’un natchtron opposé au lieu du Soleil durant ce mois. Ce mois Vrischika répond au mois Athyr des Égyptiens, qui tire pareillement son nom des Pléiades, Athuraiæ.

Ceci s’accorde avec l’assertion des brâhmanes, qui disent que lorsque leur calendrier fut réglé, la Lune était dans son plein.

On peut aussi conclure de là que les Chinois ont réglé primitivement sur les pleines lunes leur calendrier, ou qu’ils ont emprunté les noms de leurs mois d’un peuple qui les réglait ainsi, soit des Indiens, soit d’un autre peuple, puisqu’ils ont conservé des dénominations de mois qui ne sont que des altérations de celles des Indiens et qui, répondant à la même saison, au même mois, ont dû être prises des même natchtrons, dont les mois indiens tirent leurs noms. Donc, il y a eu communication, de quelque part qu’elle vienne, ou une origine commune, du calendrier des deux peuples indiens et chinois.

En voici la preuve. Les trois mois d’hiver dans le calendrier chinois sont Pehoua, Mokué, Pholkuna. Les trois mois d’hiver du calendrier indien sont Paush, Māgh et Phālgun. Or, ces noms indiens sont tirés du huitième natchtron Pushya, du dixième Maghā et du douzième Uttara Phalgunī.

Les variantes des dénominations du même mois chez les Indiens offrent des différences plus grandes entre elles que celles que présentent ici les noms de ces trois mois prononcés et altérés par les Chinois.

Les altérations sont plus fortes quand on les compare avec les noms égyptiens. Néanmoins, on aperçoit encore des traces d’une origine commune, mais bien ancienne. Ainsi janvier s’appelle Tai dans l’Inde et Tybi en Égypte ; février s’appelle Mokué en Chine et Mekhir en Égypte ; mars, Phālgun dans l’Inde et Pholkuna en Chine ; c’est Phamenoth en Égypte. Ces mois ont les mêmes lettres initiales.

C’est surtout entre les Indiens et les Chinois qu’on peut apercevoir cette filiation dans les dénominations et les divisions astronomiques. Ainsi, la division de l’année en six saisons de deux mois chacune, qui est d’usage dans l’Inde où elle est connue sous le nom des six ruthus, se retrouve également en Chine [29].

Le nœud ascendant de la Lune, appelé Ketu chez les Indiens, se nomme Kitou chez les Chinois [30].

La division du mois lunaire en temps blanc et en temps noir, dont le premier comprend les jours qui s’écoulent depuis la nouvelle lune jusqu’à la pleine lune et le second ceux qui s’écoulent depuis la pleine lune jusqu’à la nouvelle, est commune aux Chinois et aux Indiens [31].

Les Chinois appellent Sing leur vingt-cinquième sou, ou constellation lunaire, qui répond au Lion. C’est le nom de cet animal céleste dans le Zodiaque indien.

Les Chinois ont douze Siang, ou signes, comme tous les autres peuples.

La période de 432 000 ans qui est la base de beaucoup de calculs des brâhmanes, période fictive que nous avons analysée et expliquée [32], se retrouve aussi chez les Chinois. C’est ce que nous prouvons dans notre ouvrage manuscrit sur les cosmogonies.

On y remarque aussi la période de 10 800 ans, que Linus et Héraclite empruntèrent des Orientaux ; elle est aussi dans l’Inde.

On y trouve également les trente-trois cieux des Tibétains, qui répondent aux trente-trois classes de génies Devas de la Théologie indienne. Cette fiction théologique a été exprimée par les Lamas sous l’emblème d’un éléphant qui a trente-trois têtes rouges.

Les Chinois comptent aussi cinq éléments, comme les Indiens et les Manichéens, qu’on a appelés quelquefois secte indienne.

Il est donc impossible de ne pas reconnaître l’existence d’une ancienne communication des Chinois avec les Indiens, j’ajouterai même avec les Perses et les Égyptiens.

Le père Gaubil lui-même, dans une lettre écrite à M. Anquetil [33], dit que les brâhmanes étaient venus de l’Inde en Chine et que les Chinois traduisirent dans leur langue ce qu’ils apprirent de leur astronomie. Les ressemblances que nous avons vu établies plus haut entre les dénominations des mois chez les Indiens et chez les Chinois semblent justifier cette assertion. L’astronomie en Chine a subi plusieurs révolutions dans ses méthodes, quoiqu’on y ait constamment observé [34]. Chaque astronome a eu la sienne.

Les Chinois ont une astronomie qu’ils appellent indienne [35].

II paraît qu’ils ont emprunté beaucoup de choses des étrangers à diverses époques.

II est d’autres dénominations de mois qu’on trouve chez eux, qui ne sont évidemment que des noms de mois persans qu’on a dénaturés par une prononciation étrangère [36]. Et les Chinois prononcent difficilement les mots des autres langues.

Quant aux Indiens et aux Persans, nous avons dans les figures de leur Zodiaque plusieurs caractères de ressemblance. Le Sagittaire, par exemple, est représenté chez l’un et l’autre peuple avec une queue de serpent, qu’il regarde en tournant sa tête et sur laquelle il décoche une flèche [37].

Cet emblème composé a pour origine un aspect astronomique. Il est emprunté de la queue du serpent du Serpentaire, qui se couche avec la croupe du Sagittaire. C’est sur cette queue et sur celle du Scorpion qu’il semble diriger son trait [38]. Chez les Perses et chez les Arabes, qui lui donnent aussi la queue de serpent [39], il est représenté avec le corps du Tigre, ou de l’animal céleste placé entre lui et le Centaure. C’est la Tigresse que nous voyons casée dans le seizième natchtron, près du Scorpion, dans la division indienne.

Quant aux Égyptiens, ils avaient une ancienne division de l’année en trois saisons, de quatre mois chacune. Elle se retrouve aussi en Chine, c’est ce que les Chinois appellent l’année de la Sainte Loi [40].

Ces traces de l’ancienne communication des nations savantes de l’Orient entre elles sont précieuses à recueillir, et c’est surtout dans notre manuscrit des cosmogonies que nous les faisons remarquer et qu’elles sont réunies et comparées de manière à faire voir que l’ancien et le nouveau continent n’étaient point étrangers l’un à l’autre dans les siècles reculés de la haute antiquité.

Après avoir expliqué d’après quels principes ce tableau a été composé, et avoir fait remarquer les lumières qu’il jette sur les rapports que les calendriers et l’astronomie des divers peuples de l’Orient ont entre eux, nous allons parler de l’usage qu’on peut en faire pour l’étude de la chronologie astronomique et de la mythologie.

L’astronomie a ses dates et ses époques comme l’histoire, et elles sont d’autant plus certaines qu’elle les prend dans le ciel où sont tous les éléments du calcul du temps. C’est donc aussi là que nous prendrons les bases de notre calcul, sur l’antiquité de l’astronomie, ou plutôt sur celle des emblèmes astronomiques et des divisions célestes qui sont parvenues jusqu’à nous, car nous ne prétendons pas qu’elles soient les seules ni les premières que les hommes aient imaginées.

Nous écartons de notre calcul toutes ces périodes fictives, ces époques ou conjonctions imaginaires qui remontent à plusieurs milliers de siècles et que l’on retrouve dans tout l’Orient. Nous ne faisons usage que de périodes données par la nature et d’observations bien constatées. Notre ouvrage ne portera que sur des bases avouées et solides.

De toutes ces périodes, la plus longue que nous connaissions, qui soit donnée par la nature, celle sur laquelle il n’existe aucun doute, c’est la révolution des points équinoxiaux et solsticiaux, ou des points par lesquels les colures coupent l’écliptique et l’équateur à 90° de distance l’un de l’autre. C’est à ces points qu’est attaché le commencement de chaque saison. Les colures, et conséquemment leurs points d’intersection, ont un mouvement lent en sens contraire à l’ordre des signes, c’est-à-dire du Taureau au Bélier, du Bélier aux Poissons, etc. Ce mouvement est d’environ 50’’ de degré par an, ou d’un degré en 72 ans, ce qui donne pour la révolution entière 25 960 ans. C’est ce qu’on appelle la période du mouvement apparent des fixes en longitude et que nous appellerons la grande année, dont chacun des mois, ou le déplacement entier d’un signe, est de 2 163 ans.

Il résulte de ce mouvement en sens contraire à celui des planètes et au mouvement apparent du Soleil, que cet astre, achevant sa carrière en suivant l’ordre des signes, rencontre les points équinoxiaux et solsticiaux qui se sont mus en sens opposé, 50’’ en deçà du point où il les aurait rencontrés s’ils fussent restés fixes comme les étoiles auxquelles on compare la marche du Soleil et la succession des saisons qui dépendent de cette marche.

Les équinoxes, ou l’égalité des jours et des nuits, les solstices ou le maximum et le minimum de leur durée, se reproduisent tous les ans 50’’ en deçà du point où ils avaient eu lieu l’année précédente, ou sous des étoiles moins avancées en longitude que celles auxquelles ils répondaient en commençant leur révolution. Ce qui donne un mois entier d’anticipation au bout de 2 163 ans. Il résulte de là que l’égalité des jours et des nuits au printemps, qui autrefois arrivait, par exemple, lorsque le Soleil était uni aux Pléiades vers la fin de la constellation du Bélier, arrive aujourd’hui près de deux mois avant qu’il ait atteint ces mêmes étoiles, c’est-à-dire lorsqu’il ne fait encore que répondre aux premières étoiles des Poissons. Voilà ce qu’on appelle précession des équinoxes. On aurait pu dire également précession des solstices. Il n’en résulte aucun changement dans l’ordre des saisons. Seulement le Soleil ne paraît pas sous les mêmes étoiles auxquelles il répondait autrefois quand ces saisons arrivaient. Les étoiles rencontrées par le Soleil dans le premier mois de printemps ne le sont que dans le second mois au bout de 2 163 ans. Mais, les étoiles étant des corps infiniment éloignés hors la sphère de notre système, elles n’ont aucune influence sur la température de l’air et ne sont que des points fixes qui servent de terme de comparaison pour rapporter le lieu du Soleil et des planètes à telle ou telle époque de leur révolution.

Nous sommes entrés dans ces détails en faveur de ceux qui, n’ayant pas des idées assez précises de la nature de la précession des équinoxes et de ses effets, suivraient difficilement notre explication, laquelle porte sur cette base.


C’est pour peindre ce mouvement et le suivre dans les diverses époques de sa révolution que nous avons imaginé une croix, ou étoile, supposée mobile, qui a son centre sur celui du Soleil et sur celui du Zodiaque, dans lequel sont renfermées les maisons lunaires. Les deux lignes du milieu de chacune des branches de l’étoile, qui se coupent à son centre et qui aboutissent à ses pointes que termine une fleur de lys, représentent les lignes d’intersection que tracent sur le plan de l’écliptique les colures en le coupant en quatre parties égales au point initial de chaque saison, où elles marquent le point mobile des équinoxes et des solstices.

Nous avons donné aux colures, et conséquemment à la croix qui les représente, la position qu’ils ont dû avoir lorsqu’on a imaginé cette division en vingt-huit maisons. Car il est naturel de penser qu’on est parti d’un des quatre points cardinaux de la sphère, soit solstices, soit équinoxes, pour faire cette distribution et qu’on en a attaché le point initial au point initial d’une saison ou de l’année. Au moins c’est la supposition la plus vraisemblable et que justifie la distribution actuelle des douze maisons du Soleil ou des signes du Zodiaque.

Nous ne prendrons point sur nous de faire l’autre supposition, savoir qu’on aurait pris pour point de départ ou initial de la division une étoile quelconque, au hasard, hors des limites, des saisons et des cercles qui les déterminent, enfin, une étoile obscure, telle que gamma du Bélier, étoile de la quatrième grandeur, par laquelle commence cette division chez les Indiens, chez les Perses, chez les Arabes. Cette supposition nous paraît si invraisemblable que nous la laisserons faire à d’autres.

Nous avons pris cependant sur nous de déterminer entre ces deux lignes verticale et horizontale du tableau, c’est-à-dire entre celle qui passe par le Cancer et le Capricorne et celle qui passe par la tête du Bélier et les pieds de la Vierge, quelle est celle qui représente le colure équinoxial et celle qui représente le colure solsticial dans la position primitive. Notre opinion est trop connue pour la déguiser. Notre intention cependant est de laisser au lecteur toute liberté dans son choix. Nous ferons seulement quelques observations.

Si l’on suppose avec nous que c’était le colure équinoxial qui passait par la tête du Bélier et par les pieds de la Vierge lorsqu’on a imaginé cette division des vingt-sept ou vingt-huit maisons, c’est-à-dire que cette division partait d’un équinoxe, comme celle de notre Zodiaque, alors les colures avaient la position que nous avons appelée primitive dans notre mémoire sur l’origine des constellations et dans nos observations sur le Zodiaque de Dendérah [41] en parlant de l’usage du petit Verseau mobile. Toutes les preuves que nous avons apportées alors pour établir notre système reçoivent ici une nouvelle confirmation. Les deux Zodiaques remontent à la même époque, ont une même origine, sont absolument le fruit du même génie et sont dans une parfaite harmonie ; et tous deux marchent avec les saisons et partent de l’équinoxe de printemps occupé alors par la Balance. Le véritable commencement est aux pieds de la Vierge près l’Épi, c’est-à-dire là où commence le Zodiaque chinois. Celui des Indiens et des autres ne se trouve commencer au point opposé que parce que les Indiens prenaient pour base les pleines Lunes, comme nous l’avons fait voir plus haut

Cette supposition a encore l’avantage de s’accorder avec la chronologie des Égyptiens rapportée par Pomponius Mela [42].

Si l’on préfère l’hypothèse qui prendrait pour colure équinoxial la ligne verticale, c’est-à-dire celle qui passe par le Cancer et le Capricorne, alors le colure solsticial serait celui qui passe par les pieds de la Vierge et par la tête du Bélier et la division serait partie des solstices au lieu de partir des équinoxes. L’époque de cette position a l’avantage d’être plus rapprochée de nous mais elle n’a que celui-là. Chacun peut faire le calcul de la différence. Du reste, si l’on ne choisit pas l’une, il faut nécessairement prendre l’autre, il n’y a pas de milieu.

Quelle que soit la supposition qu’on admette, nous convenons que nous n’avons pas d’observations qui remontent aussi haut que celle de la position primitive. Les colures s’en étaient déjà de beaucoup éloignés aux époques où furent faites les observations qui nous sont parvenues, comme on va le voir.

Pour rendre ce déplacement et cet écart sensibles, nous avons imaginé une croix mobile en carton, dont le centre est fixé sur le centre de la croix du tableau par une épingle ou par un petit clou, qui sert de pivot à cette croix mobile dont les extrémités marquent les points équinoxiaux et solsticiaux sur le grand cercle gradué qui comprend les autres cercles concentriques, et près duquel sont gravées les images des douze constellations du Zodiaque.

C’est sur ce cercle que nous avons marqué, par des lignes tirées hors du cercle, la position des équinoxes et des solstices aux époques où ont été faites diverses observations chez les Égyptiens, chez les Chinois, chez les Indiens, chez les Perses, chez les Chaldéens, chez les Arabes et même chez les Grecs. Les observations de l’équinoxe de printemps sont désignées par les lettres EP et à droite, en regardant en face du tableau, près du Taureau. Celles d’automne, marquées EA, sont à gauche, vers le Scorpion, celles du solstice d’été sont marquées SE et en haut du tableau, la plupart près du Lion. Celles du solstice d’hiver, marquées SH, sont en bas, dans le Verseau. Les unes et les autres, chez le même peuple et à la même époque, sont distantes l’une de l’autre de trois signes ou de 90°, de manière que, quand on pose une des extrémités de la croix sur l’une de ces lignes, toutes les autres extrémités sont couchées sur les autres lignes ou sur les points équinoxiaux et solsticiaux qui dépendent de cette observation et qui tiennent à cette époque.

Au reste, pour le plus grand nombre des observations, nous nous sommes bornés à déterminer le lieu de l’équinoxe de printemps à l’époque de l’observation pour ne pas trop charger le tableau de lignes qui, d’ailleurs, deviennent inutiles parce qu’une fois la position de la pointe qui marque l’équinoxe de printemps étant déterminée, les trois autres pointes sont nécessairement sur le degré du cercle qui leur appartient. Nous avons cependant marqué les quatre points par des lignes pour les observations de l’Inde, de la Chine et de la Perse, et pour le siècle actuel, et pour le commencement de l’ère vulgaire.

Il sera à propos de décrire autour du centre de la croix mobile un cercle égal à celui de la croix fixe, représentant l’orbite de la terre sur laquelle il sera posé, et sur la circonférence de laquelle on fera mouvoir la sienne, afin que les quatre points d’intersection marqués sur ce cercle par les lignes qui passent par le milieu, par les extrémités et le centre de la croix mobile, marquent, dans les diverses positions que prendra la croix, le lieu de la terre dans son orbite, au commencement de chaque saison, durant le cours de la grande période.

Il sera également nécessaire de marquer sur chacune des intersections, ainsi que vers la pointe de la ligne qui la forme, les désignations EP, EA, SE, SH qui annoncent que là est l’équinoxe de printemps, celui d’automne, le solstice d’été, celui d’hiver.

On laissera un cercle plein et presque du diamètre de l’espace circulaire qui se trouve entre le centre S et le premier cercle où sont les noms des maisons lunaires. On écrira Est entre la branche SE et EA, ou dans le quart de cercle intercepté entre la branche qui marque le solstice d’été et celle qui marque l’équinoxe d’automne, Sud entre la branche EA et la branche SH, Ouest entre la branche SH et la branche EA, et Nord entre la branche EA et la branche SE, ou celle qui marque le solstice d’été. Par-là on verra comment l’aiguille en se mouvant change l’est, le sud, l’ouest et le nord du mouvement annuel, tous les 6 500 ans environ.

Après cette préparation, on supposera exactement la croix mobile sur la croix fixe et on fera marcher contre l’ordre des signes son extrémité EP en la supposant partie d’en haut, qui est l’hypothèse la plus rapprochée de nous, jusqu’à ce qu’elle s’arrête sur le lieu, ou sur le degré d’un natchtron, ou d’un sou, ou d’une station lunaire désignée par l’observation. En voici des exemples.

Le Surya Siddhanta, qui est le plus ancien livre d’astronomie des Indiens [43], détermine le lieu des colures, à l’époque à laquelle l’auteur indien écrivait, au 10° de la seconde constellation appelée Bharanī. C’est là qu’il fixe le point équinoxial de printemps. Il le place donc à 23°20’ de distance de l’étoile gamma du Bélier, qui est le point initial de cette division. En effet, chaque natchtron ayant 13°20’ d’étendue, si l’on ajoute à ces 13°20’ du premier natchtron les 10° du second, on aura 28°20’ de distance au point initial, ou à l’étoile gamma.

 Le signe des Poissons à l'observatoire de 
Jantar Mantar (Inde) - Photo : Sharilyn Neidhardt
Si l’on fait descendre la pointe de la ligne verticale marquée EP jusqu’à ce qu’elle soit arrivée par ce mouvement rétrograde, qui est celui de la précession, au 10° de la seconde constellation lunaire ou de Bharanī, et si on l’arrête sur la ligne qui est tirée hors du cercle, et marquée EP des Indiens, on aura la position des colures telle qu’elle est indiquée dans le Surya Siddhanta, c’est-à-dire que la pointe SE ou le solstice d’été sera posée sur le 6°40’ d’Āshleshā ou du neuvième natchtron, la pointe EA ou l’équinoxe d’automne sur le 3°20’ de Vishākhā ou de la seizième constellation, et la pointe SH sur le premier degré de Dhanistha, ou de la vingt-troisième constellation. Voilà donc une position bien déterminée sur le cercle gradué qui nous sert à fixer les lieux, des solstices et des équinoxes à différentes époques. Il est aisé de calculer l’époque à laquelle remonte celle-ci. L’étoile gamma du Bélier a aujourd’hui 1 signe 0° 25’ de longitude, c’est-à-dire qu’à l’époque du Surya Siddhanta elle était 23°20’ au-dessous du point équinoxial de printemps et qu’aujourd’hui elle est 30°25’ au-dessus. Donc, le point équinoxial a rétrogradé de la somme de ces deux quantités, c’est-à-dire 53°45’ depuis l’observation consignée dans le Surya Siddhanta.

Or, chaque degré de rétrogradation demande 72 ans, donc, multipliant 53°45’ par 72, nous aurons l’espace de temps écoulé depuis cette observation jusqu’à nous, c’est-à-dire 3 870 ans, ou 2 064 ans avant notre ère.

Si nous voulons savoir maintenant sur quel degré du cercle gradué doit répondre cette époque, nous retrancherons de ce nombre 2 064 le nombre 388, qui est celui des années antérieures à notre ère, où le colure équinoxial passait par gamma du Bélier et où commence notre graduation avec la première maison ou avec le premier natchtron, et nous aurons 1 676 ans. Divisant ce nombre par 72 pour le convertir en degrés, nous aurons 23°16’37’’, ce qui approche beaucoup de la détermination des Indiens à 23°20’, ou à 10° de Bharanī.

Cette observation, comme on le voit, remonte à près de 1 300 ans avant la première Olympiade, plus de 1 000 ans avant la guerre de Troie, plus de 600 ans avant l’époque assignée au règne des Pharaons en Égypte, 742 ans avant le renouvellement de la période sothiaque sous Sésostris, près de 500 ans avant l’époque donnée par le Zodiaque de Dendérah, près de 600 ans avant l’époque assignée au prétendu déluge de Deucalion, et de 200 avant celui d’Ogygès. Cependant, elle est postérieure à toutes celles que nous allons bientôt rapporter.

Les Indiens ne se sont pas bornés à désigner dans les natchtrons le lieu du commencement de chacune des saisons de trois mois ou la position des colures. Ils ont également déterminé le point initial de chaque saison de deux mois, ou des ruthus. Nous les avons marqués par une petite ligne oblique sur la circonférence du cercle gradué, et par la lettre initiale R, suivie du nom de chaque ruthu.

Le premier part de l’ancien solstice d’hiver donné par le Surya Siddhanta et se nomme Shishira. Il s’étend depuis le 1° de la vingt-troisième constellation Dhanistha jusqu’au milieu de la vingt-septième Revatī, qui répond au lieu des Poissons. Le second ruthu, Vasanta, commence au milieu de Revatī, et s’étend jusqu’à la fin de Rohinī ou de la quatrième constellation qui comprend les Hyades. Le troisième ruthu, GriiShma, s’étend depuis le commencement de la cinquième constellation, Mrigashīra, jusqu’au milieu d’Āshleshā ou de la neuvième constellation, qui comprend les étoiles de la tête du Lion et qui se termine au solstice d’été, son terme nécessaire, puisque le premier ruthu commence au solstice d’hiver.

Le quatrième ruthu, VarSha, s’étend depuis le milieu d’Āshleshā jusqu’à la fin d’Hasta ou de la treizième constellation, qui comprend les étoiles de la main de la Vierge. Le cinquième ruthu, Sharat, commence au 1° de Chitrā, ou de la quatorzième constellation qui renferme l’Épi, et s’étend jusqu’au milieu de Jyeshtha, ou de la dix-huitième constellation qui comprend les étoiles de la queue du Scorpion.

La sixième et dernière saison, celle d’Hemanta, commence au milieu de Jyeshtha et s’étend jusqu’à la fin de Shrāvana, ou de la vingt-deuxième constellation, qui comprend les étoiles de l’Aigle et la queue du Capricorne.

Les "planètes" traditionnelles, Saturne, Jupiter, Mars, 
Vénus, le Soleil, Vénus, Mercure et la Lune
Observatoire de Jantar Mantar
Photo Sharilyn Neidhardt
Il est évident qu’il n’y a pas ici d’accord entre les saisons et les maisons puisqu’il faudrait, pour cela, que la dernière saison finît à la fin de la dernière maison Revatī, ou de la vingt-septième constellation ; et que la première saison commençât au 1° d’Ashvinī, au lieu qu’elle commence et finit cinq maisons plus tôt qu’Ashvinī. Donc, si les saisons et les maisons ont été primitivement d’accord, ce qui est très vraisemblable, il y a eu un déplacement des colures ou de la croix qui les représente, et ce déplacement qui a troublé cet accord est de cinq maisons entières, si les saisons ont commencé par l’hiver, et de près de douze maisons si elles ont commencé au printemps, comme nous le supposons. Chaque maison, pour être parcourue par le mouvement rétrograde de l’extrémité de la croix, exige un espace de 961 ans, que l’on multipliera soit par 5, soit par 12 pour avoir l’époque à laquelle cette harmonie a dû exister ; ce qui remonte à 6 885 ans environ dans l’hypothèse la plus rapprochée, et à 15 174 ans environ dans la première supposition qui met en harmonie les deux Zodiaques et les Saisons ; alors tout part des pieds de la Vierge. La Balance se trouve placée à l’équinoxe de printemps, ou près la première maison des Chinois, Kio.

Le lecteur est libre de choisir entre ces deux hypothèses mais s’il rejette cette dernière, il doit nécessairement admettre la première pour mettre les maisons en harmonie avec les saisons.

Enfin, pour revenir sur cette idée que nous croyons la plus importante de ce mémoire par ses conséquences, nous trouvons la croix mobile dans une position telle qu’aucune de ses quatre pointes ne coïncide avec le commencement de la division, soit indienne, soit chinoise, et cependant cette coïncidence a dû exister lorsque ces divisions furent établies, du moins c’est la seule supposition raisonnable qu’on puisse faire. Il faut donc faire rétrograder la croix jusqu’à ce que cette coïncidence se reproduise. Or, le mouvement que nous devons lui donner pour cela doit être suivant l’ordre des signes, puisque son mouvement naturel est contre cet ordre. Donc, pour la faire revenir sur ses pas, ce n’est pas du 10° de Bharanī où la place l’observation du Surya Siddhanta qu’il faut faire mouvoir la pointe EP vers le 1° d’Ashvinī, qui n’en est distant que de 23°20’. Ce chemin est le plus court sans doute mais elle ne reviendrait point sur ses pas, elle continuerait, au contraire, sa route, elle prendrait la position qu’elle eut 1 676 ans après l’observation, époque à laquelle on eut encore une coïncidence mais qui n’est pas celle qu’elle a eue antérieurement à cette époque et qui doit nous donner la quantité de son déplacement.

Il faut donc la faire remonter du 10° de Bharanī, ou du second natchtron, au 10° de Punarvasu ou du septième natchtron, c’est-à-dire la faire revenir sur ses pas l’espace de cinq natchtrons ; ce sera la quantité dont elle se sera déplacée dans l’hypothèse que la division s’est faite par les solstices. C’est le moindre déplacement que l’on puisse supposer, c’est le moindre chemin qu’elle ait à faire pour qu’une de ses extrémités coïncide avec la première maison. Cette extrémité sera celle du colure des solstices, où répond l’hiver pour les Indiens et l’extrémité opposée, celle de l’été, pour les Chinois dont la première maison est opposée à celle de la division indienne, comme le solstice d’hiver l’est à celui d’été. Alors, la croix mobile se trouvera confondue avec la croix fixe et posée exactement sur elle. Alors le commencement de la division, soit indienne, soit chinoise, partira d’un colure, c’est-à-dire du commencement d’une saison. Ce sera des solstices si nous nous arrêtons à la coïncidence la plus prochaine qui ait pu avoir lieu ; si au contraire on suppose, comme nous, une coïncidence antérieure à celle-ci, et si l’on fait encore rétrograder la pointe EP d’un quart de cercle jusqu’à ce qu’elle réponde aux pieds de la Vierge, et que l’autre extrémité EA vienne au 1° d’Ashvinī ou à la tête du Bélier, alors le commencement des deux divisions partira des deux équinoxes et nous obtiendrons un accord parfait de la division solaire avec la division lunaire, avec les saisons et avec la chronologie de Pomponius Mela. Enfin la sphère aura la position que nous avons dit, il y a plus de 25 ans, avoir été la position primitive, comme on peut le voir dans notre mémoire sur l’origine du Zodiaque, imprimé alors dans le quatrième tome de l’astronomie de M. de Lalande et réimprimé depuis dans notre grand ouvrage [44] et, comme nous le répétons, dans nos observations sur le Zodiaque égyptien trouvé à Dendérah [45].

Voilà quelles sont les conséquences qui suivent nécessairement de l’observation des colures rapportés à une division remplie de points éternellement fixes, comme sont les étoiles casées dans chaque natchtron, division dont le point initial est fixe et bien connu, tel que l’étoile gamma de la tête du Bélier, d’où partent les maisons lunaires chez les Indiens, chez les Perses et chez les Arabes.

Tous les Pandits que j’ai consultés, dit M. Jones [46], assurent à l’unanimité que le 1° de Mesha, ou d’Aries et le 1° d’Ashvinī, premier natchtron, et origine de cette division, coïncident entre eux. Voilà donc un point bien déterminé.

Certainement, si, lorsqu’on imagina la division par maisons, les colures eussent été dans la position que leur assigne le Surya Siddhanta, c’est-à-dire si le nœud équinoxial de printemps, ou la pointe EP de la croix, eut été au 10° de Bharanī, près du troisième natchtron Krittikā, qui répond aux Pléiades, ce natchtron eût été appelé le premier et non pas le troisième, et les Pléiades auraient ouvert la marche de la division, ce qui n’est pas. Nous en dirons de même de la constellation Fang des Chinois, qui dans la même supposition devrait s’appeler la première, tandis qu’elle est la quatrième.

On ne peut opposer à notre démonstration, car nous osons lui donner ce nom, qu’une seule chose, c’est de dire qu’on s’est accordé à prendre pour point initial de la division une étoile quelconque au hasard. À cela je ne fais point de réponse, parce que je n’écris que pour l’homme de bon sens et de bonne foi.

On ne peut rien trouver de plus authentique, de plus précis, que ces positions que nous donnent les Indiens, non seulement celles des quatre points cardinaux de la sphère mais encore celles des six points où commencent les ruthus, et le tout rapporté aux maisons lunaires, dont nous connaissons le nombre, l’étendue, l’ordre, le commencement et la fin, déterminés par des points éternellement fixes. Il faudrait tout nier si l’on contestait l’authenticité de ces époques astronomiques.

À l’appui des indications données par le Surya Siddhanta, qui est, comme nous l’avons dit, le plus ancien traité d’astronomie des Hindous, livre si respecté qu’on le croit descendu du ciel [47], vient encore le témoignage de Varâha [48], qui écrivit bien des siècles après. On lit dans son ouvrage, renfermé en cinq stances, ces mots : "Certainement le solstice méridional, c’est-à-dire celui d’été, d’où part le Soleil pour s’en aller vers le pôle méridional, ou pour voyager du nord au midi" était autrefois au milieu d’Āshleshā (ce sont les étoiles de la tête du Lion, comprises dans le neuvième natchtron), et le septentrional (celui qu’il quitte lorsqu’il remonte vers le nord) était au 1° de Dhanistha, suivant ce qui est rapporté dans un ancien śāstra" ; à présent le premier de ces solstices répond au 1° de Karkata, c’est-à-dire des étoiles du Cancer ; elles sont comprises dans Punarvasu, qui est le septième natchtron, distant de près de deux natchtrons d’Āshleshā, ou du neuvième, où répondait l’ancien solstice d’été.

L’autre solstice, celui d’hiver, est au 1° de Makara, ou des étoiles du Capricorne, c’est-à-dire dans la vingt-et-unième constellation, ou dans le natchtron nommé Uttara Ashādhā, au lieu d’être, comme autrefois, au 1° de Dhanistha, ou du vingt-troisième natchtron.

L’auteur de cette observation écrivait donc près de 400 ans avant l’ère vulgaire, et 1 676 ans après l’époque donnée par cet ancien śāstra, dont il cite l’autorité.

Il écrivait à la même époque que l’auteur d’un des Oupnek’hats [49] qui parle de ces voyages du Soleil du nord au midi et du midi au nord, et qui fixe les points de départ au 1° de la constellation du Cancer et au 1° de celle du Capricorne. C’est dans ces deux constellations que les initiés plaçaient la porte des hommes et celle des dieux dans la fiction théologique sur la route des âmes, comme on le voit dans notre ouvrage [50].

C’est aussi à-peu-près la position indiquée pour les colures dans la cosmogonie des Perses, intitulée Boundehesch [51], ce qui prouve combien ces ouvrages sont modernes en comparaison des anciens śāstras et du Surya Siddhanta.

Musée du Louvre, Paris -  Photo : Didier Castille
En effet, le Boundehesch fixe au premier kordeh, ou dans le signe de l’Agneau, l’égalité des jours et des nuits au printemps, que le Surya Siddhanta dit répondre de son temps au 10° de Bharanī ou à la fin de la seconde maison. Il est vrai que l’étendue d’un kordeh est d’environ 13°, et qu’il ne détermine pas à quel degré du kordeh répondait l’équinoxe, ce qui laisse une incertitude de près de 930 ans. Si nous prenons le milieu, cette époque pourrait bien être de 850 ans au moins avant notre ère, ce qui la placerait un peu au-dessus de celle de la première Olympiade.

Le Boundehesch met, sans dire aussi à quel degré, le solstice d’été dans un kordeh du Cancer, au moins dans le huitième ou Tarké. Il fixe l’équinoxe d’automne dans un kordeh de la Balance, "lorsque le kordeh de la Balance arrive," dit l’auteur de cet ouvrage, "les jours sont égaux aux nuits, c’est le commencement de l’automne. Un des kordehs qui répond à la Balance est Hosro, ou le quinzième."

Lorsque le kordeh du Capricorne arrive, ce sont les plus longues nuits, c’est le commencement de l’hiver. Ce kordeh est Goi, ou le vingt-deuxième.

Et lorsque l’Agneau reparaît, c’est-à-dire Aries, où commence la division lunaire, les jours sont de nouveau égaux aux nuits.

L’auteur nous trace la route du Soleil du nord au midi et du midi au nord, ou ce double voyage dont parlent les Indiens. Le Soleil, dit le Boundehesch [52], "faisant en haut sa révolution autour du monde s’arrête au haut du mont Albordi, et après avoir fait le tour du Tireh, il revient sur ses pas", ce qui ne peut s’entendre que du mouvement en déclinaison. "Depuis le temps où le Soleil arrive dans les longs jours (solstice d’été) jusqu’à ce qu’il vienne aux jours plus courts (l’équinoxe d’automne), il est dans l’est. Depuis qu’il est parvenu aux jours moins longs jusqu’à ce qu’il vienne aux jours les plus courts (solstice d’hiver), il est dans le midi. Depuis qu’il est parvenu aux jours les plus courts jusqu’à ce qu’il arrive aux jours plus longs, il est dans l’ouest. Et depuis qu’il est arrivé aux jours plus longs jusqu’à ce qu’il arrive aux jours les plus courts, il est dans le nord". Ainsi, il est arrivé au terme du nord au solstice d’été et à celui du midi au solstice d’hiver. Depuis le terme nord où il entre dans l’est pour arriver au terme midi, ils disent qu’il est dans l’est 180 jours, et depuis qu’il entre dans l’ouest, ou qu’il remonte, ils disent qu’il est 180 jours dans l’ouest. Ils comptent pour ce double voyage 360 jours, plus 5 jours qu’ils y ajoutent.

Chaque mois a son signe particulier. "Le mois Tir, qui est le quatrième de l’année, répond au Cancer, qui est le quatrième signe à commencer par l’Agneau. Depuis le Gâh medioschem dans le mois Tir ou le mois du Cancer [53], le jour Khor compris jusqu’au Gâh mediarem dans le mois Din, le jour Behram compris, les jours diminuent et les nuits augmentent ; et du Gâh mediarem jusqu’à medioschem (au Cancer) les jours augmentent et les nuits diminuent".

On voit que l’auteur du Boundehesch a bien fixé au Cancer et au Capricorne les deux termes de la route du Soleil, mais qu’il n’en a pas déterminé le degré, comme a fait l’auteur de l’Oupnek’hat que nous avons cité et comme a fait Varâha chez les Indiens.

C’est ce que les Indiens appellent l’Ayanamsa austral et l’Ayanamsa septentrional [54]; c’est ainsi qu’ils disent qu’autrefois l’Ayanamsa austral, ou celui d’où partait le Soleil pour aller au midi, était dans le natchtron Āshleshā ou dans le huitième, et que son Ayanamsa septentrional était au commencement de Dhanistha ; tandis que l’auteur du Varasanitha, qui est de beaucoup postérieur, fixait ces points de départ, l’un au 1° de Karkata ou du Cancer, et l’autre au 1° de Makara ou du Capricorne.

Cette division de l’année tirée de la marche du Soleil du nord au midi et du midi au nord, qui a dû être la première observée, et aisée à déterminer sur l’horizon par les lieux du coucher et du lever du Soleil, aux deux solstices, se retrouve dans le nord de la Suède [55]. Les Votiaks ont aussi fait cette remarque : ils appellent le mois de juin, le mois où le Soleil s’arrête.

Les Indiens appellent cette division, la division de la chaleur et la division du froid.

La première, dit l’Oupnek’hat [56], commence au 1° du Capricorne, c’est celle des signes ascendants, c’est le voyage vers le nord, on l’appelle division de la chaleur. C’est le temps où les Perses disent que le Soleil est dans l’ouest.

La seconde part du 1° du Cancer, c’est la division du froid, c’est-à-dire celle qui ramènera le froid, c’est le voyage du Soleil vers le midi.

L’année entière s’appelle Botxoro, elle se divise en deux théôn, celui d’été et celui d’hiver [57]. Chaque théôn est subdivisé en trois ruthus dont chacun compose une saison. Nous avons parlé plus haut de cette subdivision en ruthus : on caractérise chaque ruthu par les phénomènes météorologiques de la saison ou du ruthu.

Le premier, commençant au solstice d’hiver, est appelé hyems, le second pruina, c’est leur nivôse, le troisième ver, le quatrième oestas, c’est leur thermidor, le cinquième pluvia, c’est la saison des pluies dans l’Inde, et le sixième ruthu se nomme automne.

Cette double division de l’année prise du mouvement du Soleil en déclinaison se retrouve en Chine, et la progression successive de la lumière croissante et décroissante sépare en deux parties l’année d’une manière si tranchante qu’elle a été presque partout observée et qu’elle a fourni une des premières divisions du temps. Les Chinois appellent le temps que dure le voyage du Soleil du midi au nord, ou son mouvement dans les signes ascendants, temps du Yang, ou de la matière subtile affectée au bon principe, à la lumière et à la chaleur. Ils appellent l’autre, ou le temps que dure son éloignement du nord vers le midi, temps du Yin, ou de la matière grossière affectée aux ténèbres et au froid [58].

On pourrait croire que les deux statues colossales placées à la porte du temple de Vulcain en Égypte, et dont l’une regardait le nord et l’autre le midi, exprimaient cette double division du temps et de la marche du Soleil du midi vers le nord et du nord vers le midi [59]. La première, en effet, s’appelait l’été et la seconde l’hiver, comme dans la division indienne qui appelle été la marche progressive du Soleil du midi vers le nord, que regarde la statue égyptienne, et hiver sa marche vers le midi, que regarde l’autre. La première recevait les hommages du peuple égyptien et la seconde était traitée d’une manière toute contraire suivant Hérodote. Il est certain que ces voyages du Soleil du midi au nord et du nord au midi firent des impressions bien différentes sur les hommes. Ce qui se passait en Égypte en est la preuve.

Les Égyptiens, dit Achilles Statius [60], s’affligeaient quand ils voyaient le Soleil quitter le solstice d’été pour se retirer vers le solstice d’hiver, mais aussitôt qu’il s’arrêtait pour remonter vers le nord, ils prenaient les habits blancs et ils ornaient leurs têtes de couronnes en signe de joie. Comme ceci arrivait au septième signe à compter du solstice d’été, ils faisaient faire sept tours à la Vache sacrée autour de l’autel. On retrouve une cérémonie assez semblable chez les Indiens [61], en réjouissance de ce que le Soleil remonte vers l’Inde, dit M. le Gentil, et qu’il va ramener la fécondité représentée peut-être par la Vache.

Ce sont les observations que l’on fit de ces deux termes du mouvement du Soleil en déclinaison, et des amplitudes sur le cercle de l’horizon, qui firent apercevoir le déplacement du lieu des colures dans les maisons lunaires ou dans les natchtrons. On détermina deux points à l’orient et deux au couchant, qui étaient ceux du lever et du coucher, lors du plus grand jour et du plus court jour de l’année. Ce furent là comme les bornes que tournait le Soleil dans sa carrière annuelle : on s’aperçut au bout de quelques siècles que lorsqu’il les tournait, il n’avait pas encore atteint les étoiles près lesquelles il se trouvait quand il les tournait autrefois. On jugea donc que le lieu du solstice était moins avancé dans l’ordre des signes qu’il ne l’était autrefois, que conséquemment il y avait déplacement successif et rétrograde des nœuds équinoxiaux et des points solsticiaux.

On suivit ces observations lorsque le colure eut dépassé les étoiles du Cancer et celles du Capricorne par son mouvement rétrograde. Le Soleil, dit un auteur indien [62], "détruit le sud et l’ouest en rétrogradant, avant d’avoir atteint Makara, c’est-à-dire l’extrémité du Sagittaire». L’expression rétrograder serait ici à remarquer puisqu’elle justifierait ce que nous avons dit dans notre mémoire sur l’origine des constellations, que le Cancer fut originairement placé au solstice d’hiver pour peindre le mouvement rétrograde [63], et que c’était là véritablement qu’il semblait être rétrograde et non pas au solstice d’été, si on ne l’eût appliquée aussi à l’autre mouvement.

"II détruit le nord et l’est en rétrogradant avant d’avoir atteint Karkata, ou vers la fin des Gémeaux", c’est-à-dire que le colure solsticial, qui partageait avec le colure équinoxial le Zodiaque en quatre parties est, sud, ouest et nord, comme nous l’avons vu plus haut, ne le partageait plus aux même points et que des étoiles qui, dans les siècles antérieurs, appartenaient à la partie nord ou au quart de cercle intercepté entre le point équinoxial de printemps et le solstice d’été, passaient dans l’est ou dans la portion interceptée entre ce solstice et l’équinoxe d’automne, qu’on appelait l’est. Il en est de même des points du solstice d’hiver qui sépare la portion du sud de celle de l’ouest. Ces quatre branches de notre croix fixent ces divisions et rendent ce changement sensible quand elle se meut.

C’est peut-être la seule manière d’expliquer la tradition des Égyptiens rapportée par Hérodote et par Pomponius Mela, que le Soleil avait changé deux fois son lever et deux fois son coucher. Hérodote ne compte que 11 340 ans mais Pomponius en compte 13 000, c’est-à-dire précisément une demi-révolution des fixes. Effectivement, si au lieu du mot lever nous prenons levant ou est, et de coucher, couchant ou ouest, il est certain que pendant 13 000 ans juste, deux fois la division appelée est et deux fois celle appelée ouest changent, car les trois signes compris dans l’est passent dans le nord en 6 500 ans et les trois signes compris dans l’ouest passent dans le sud, ou dans la division appelée sud, c’est-à-dire que les lignes solsticiales et équinoxiales rétrogradent de trois signes en 6 500 ans et de six signes en 13 000 ans, ce qui nous reporte encore à la position que nous avons appelée primitive, ou ce qui place le solstice d’été dans les étoiles du Capricorne, ou à 13 538 ans de notre ère ou à 15 338 ans de notre siècle.

Si l’on admettait le calcul d’Hérodote, alors il y aurait déjà eu 1 660 ans d’écoulés depuis le départ de la grande période, lorsque les rois s’établirent en Égypte. Mais cela n’empêcherait pas que le renouvellement de trois signes en trois signes ne se fût fait deux fois, seulement le premier était déjà avancé de 23° lorsque l’Égypte se donna des rois.

Supposons donc que tout soit parti du point équinoxial de printemps, occupé alors par la Balance, que les Égyptiens regardaient comme le point de départ des mouvements célestes et de l’organisation de l’univers [64], alors le véritable point initial des divisions lunaires sera celui des Chinois qui commence aux pieds de la Vierge. Les trois signes de l’est ou les constellations que le Soleil parcourait en quittant le solstice d’été étaient le Capricorne, le Verseau et les Poissons. Le point solsticial rétrogradant jusqu’à ce que la Balance fût le premier des signes descendants, les trois constellations Balance, Scorpion, Sagittaire ont remplacé dans l’est, ou dans le quart de la division des signes compris entre le point solsticial d’été et l’équinoxe d’automne, les trois signes Capricorne, Verseau et Poissons, qui ont passé dans le sud. Le Soleil a donc déjà une fois changé d’est. Pendant les 6 500 ans suivants, la Balance, le Scorpion et le Sagittaire ont aussi passé dans le sud, et le Capricorne, Verseau et Poissons dans l’ouest, ou dans la partie comprise entre le solstice d’hiver et l’équinoxe de printemps. Alors le Capricorne s’est trouvé le premier des signes ascendants, de premier des signes descendants qu’il était 13 000 ans auparavant. C’est à-peu-près l’état du ciel donné par le Zodiaque de Dendérah et par Eudoxe, et qui avait lieu au temps d’Amasis. À cette époque, c’était le Cancer, le Lion et la Vierge qui occupaient l’est et remplaçaient la Balance, le Scorpion et le Sagittaire, qui eux-mêmes avaient remplacé le Capricorne, le Verseau et les Poissons qui occupaient l’est au commencement de la grande année. On sent que ce déplacement n’est qu’une apparence pour ces constellations et qu’il provient du déplacement réel et du mouvement rétrograde du colure solsticial d’où l’on part pour compter l’est.

On fit la même observation sur les pleines lunes solsticiales et sur les natchtrons où elles arrivaient comparés à ceux dans lesquels autrefois elles se trouvaient pleines aux points coupés par le colure.

Ainsi, à l’époque à laquelle écrivait l’auteur du Surya Siddhanta, la pleine lune qui arrivait le jour même du solstice d’hiver se trouvait être au milieu d’Āshleshā ou du neuvième natchtron. Ceux qui observèrent la même pleine lune le jour du solstice d’hiver 930 ans après, la virent pleine au milieu de Poushya ou du huitième natchtron. Donc le colure avait rétrogradé de cette quantité en temps, et de 13° 20’, ou d’un natchtron entier en degrés. Ainsi, la pleine lune solsticiale anticipait de cette quantité dans le ciel des fixes, ou dans la bande appelée Zodiaque. On dut donc se convaincre aisément qu’il y avait un mouvement lent qui reportait en arrière les points solsticiaux et équinoxiaux, et il fut aisé de calculer ce mouvement annuel, en comparant les observations faites à de grandes distances de temps, ou après un grand nombre de siècles. Une très longue durée suppléa au défaut de perfection dans les instruments et les erreurs partagées sur un grand nombre d’années devinrent presque insensibles.

Soit que la quantité de ce mouvement ait varié, soit qu’elle ait été mal calculée par les Indiens, leurs astronomes la font de 54" par an [65] au lieu des 50" que nos astronomes lui assignent. C’est sur ce mouvement que les Indiens ont établi des périodes de plusieurs millions d’années. Ces périodes se composent de 60 ans, de 600, de 360 ans, et à-peu-près des mêmes éléments que les sôsses, les néres et les sares des Chaldéens. Or, ces périodes étant en usage dès la plus haute antiquité dans l’Orient, si le mouvement de précession en est la base, comme le veut M. le Gentil, il faut que ce mouvement ait été connu en Orient depuis bien des siècles. Aussi, M. le Gentil dit que ce sont des connaissances chez eux tout à fait dignes de notre attention et respectables par leur ancienneté [66]. Il en est de même de l’usage du gnomon, qui remonte chez eux à la plus haute antiquité ; ils s’en servent pour observer l’équinoxe [67]. Ce jour-là, disent les brâhmanes, le Soleil est au milieu du monde et là où est cet astre les corps ne font point d’ombre.

La précession des équinoxes, ajoute M. le Gentil [68], paraît avoir été connue de temps immémorial dans l’Inde et les brâhmanes s’en servaient lorsque Hipparque, 128 ans avant l’ère vulgaire, ne faisait que la soupçonner et que Ptolémée, qui est venu trois siècles après, la faisait d’un degré en 100 ans. L’ignorance des Grecs ne prouve rien contre la science des Orientaux et nous aurions tort de croire que les anciens prêtres de l’Égypte, de la Chaldée et les brâhmanes fussent peu avancés parce que les Grecs des âges postérieurs, à qui ils communiquèrent difficilement leur science, ne l’étaient pas autant que leurs pères. Ce serait se tromper que de juger de l’état de la science en Europe par celle des nations américaines qui commencent à se civiliser. Tels étaient les Grecs relativement aux Orientaux dans la haute antiquité. Vous n’êtes que des enfants, disaient à Solon les prêtres de Saïs, et ils avaient raison.

M. le Gentil convient que l’on trouve chez les Indiens [69] des traces de cette haute antiquité de l’astronomie et que tout semble concourir à prouver que les brâhmanes d’aujourd’hui ne possèdent que les restes d’une science qui a été cultivée bien des siècles avant notre ère. Il est certain que la connaissance de la précession, qui remonte chez eux à une si grande antiquité, n’est point le premier pas qu’on ait fait en astronomie, comme l’astronomie n’est pas la première science que les hommes aient cultivée.

Aussi M. le Gentil fait remonter l’astronomie au-delà de l’époque qu’on assigne à un déluge universel [70]. C’est aussi l’opinion de M. Bailly [71]. Au moins elle remonte au-delà des déluges connus sous le nom d’Ogygès et de Deucalion, puisque toutes les observations marquées dans notre tableau sont placées au-dessus de ces deux déluges mythologiques.

M. le Gentil s’appuie des autorités de Saint-Cyrille, d’Abydène et du Syncelle. C’est aussi l’opinion de l’historien Josèphe [72].

Quant à nous, nous n’insistons ici sur l’antiquité de l’astronomie chez les Orientaux qu’afin que les observations que nous marquons sur notre tableau ne paraissent pas invraisemblables, puisqu’il est reconnu que l’astronomie date de très loin. On pourrait dire d’elle, comme les Indiens disent du monde, "c’est un arbre qui n’est point planté d’hier".

Les observations consignées dans le Surya Siddhanta ne sont pas les seules époques astronomiques données par les Indiens.

D’après un examen approfondi de leurs tables, M. Bailly prétend qu’elles supposent le lieu de l’apogée où il a du être 4 221 ans avant notre ère[73]. Nous avons noté par une ligne sur notre tableau le lieu de l’équinoxe de printemps à cette époque. Il est peu éloigné du lieu du solstice d’été actuel, où était l’équinoxe de printemps, du temps où fut fait le Zodiaque d’Esna.

Il y a donc 6 027 ans que l’équinoxe de printemps était là. Donc, dans 453 ans, le solstice d’été sera au point auquel répondait l’équinoxe de printemps lors de la rédaction des tables indiennes. Ces deux points ne sont donc aujourd’hui éloignés l’un de l’autre que de 6° 7’ 3o’’. C’est ce qu’on voit sur le tableau.

C’est le terme le plus éloigné des observations anciennes d’où nous ayons déduit le lieu de l’équinoxe de printemps, si pourtant on excepte le Zodiaque d’Esna. Cette détermination, toute indirecte qu’elle est, n’en est pas moins sure, si les calculs de M. Bailly sont exacts, car il est ici notre garant.

Elle est précieuse pour signaler tous les points de la route rétrograde des nœuds équinoxiaux, et elle n’est pas invraisemblable d’après ce que nous avons dit de l’antiquité de l’astronomie dans l’Inde et dans tout l’Orient.

Nous n’avons point marqué le lieu de l’équinoxe au commencement de l’âge de Kali Yuga, qui remonte à 3 101 avant notre ère [74], ou à 4 907 ans de distance de la présente année, parce que cette date fait partie de périodes fictives, que nous avons analysées ailleurs [75], et parce que nous excluons de notre tableau tout ce qui peut paraître fabuleux.

Au reste, quelqu’opinion que l’on ait de cette époque fixée par M. Bailly, elle n’influe en rien sur les conséquences que nous nous croyons autorisés de tirer des positions données par le Surya Siddhanta et du défaut de coïncidence des colures avec le point initial de la division du Zodiaque en natchtrons ou en maisons lunaires. Nous avons un Zodiaque indien, imprimé dans les "Transactions philosophiques" de 1772, qui place l’équinoxe de printemps aux Gémeaux et les solstices comme dans le Zodiaque d’Esna. Nous en avons parlé dans notre mémoire sur l’origine des constellations et M. Bailly l’a fait imprimer à la fin de son traité de l’astronomie ancienne. Aussi M. Bailly convient que le point équinoxial était au moins au 1° des Gémeaux quand on créa le Zodiaque. Je prouve qu’il était beaucoup plus loin et à la Balance.

M. Jones [76] nous dit que le Zodiaque est, chez les Indiens, d’une très haute antiquité. Or, ce Zodiaque renferme l’image d’une Balance. Donc cette image n’est pas moderne. Il ajoute que les noms des étoiles zodiacales se trouvent dans les Védas à l’égard desquels, dit-il, je crois fermement sur des preuves tirées d’eux-mêmes [77] et, d’ailleurs, que trois d’entre eux ont plus de 3 000 ans d’antiquité [78]. Donc, plus de 1 200 avant Auguste, la Balance, qui fait partie de ce Zodiaque, comme on le voit dans celui des "Transactions" et dans celui de M. Jones, existait [79].

La Balance, dit Bailly [80], fut mise autrefois dans les serres du Scorpion et il serait difficile de prouver qu’elle eût été inconnue à Ptolémée. Il est certain au moins que Vitruve [81], Geminus [82] et Cicéron, qui écrivaient avant Ptolémée, la connaissaient. D’ailleurs, ajoute Bailly, il est évident qu’elle était dans le Zodiaque indien depuis longtemps. On me pardonnera cette digression : j’ai cru devoir attaquer encore l’erreur de ceux qui s’obstinent à dire, et cela sans aucune espèce de preuve, que ce symbole n’est pas ancien. Je soutiens qu’il est de la même antiquité que les autres. On peut voir ce que nous en disons et les preuves que nous apportons dans notre mémoire sur l’origine des constellations et dans nos observations sur le Zodiaque de Dendérah [83]. Ce Zodiaque évidemment est partagé en deux par le colure des solstices, il est au moins aussi ancien que celui d’Eudoxe, c’est-à-dire qu’il remonte au moins à 1 400 ans avant notre ère. Or, la Balance y est avec les autres images symboliques qui caractérisent chacun des douze signes du Zodiaque. Elle est aussi dans le Zodiaque d’Esna qui remonte encore plus de 2 000 ans plus loin que celui de Dendérah.

L’astronomie des Chinois nous fournit des époques aussi précises et encore plus anciennes que celle des Indiens. Elles ont de plus l’avantage d’être parfaitement d’accord avec leur chronologie, fondée sur des cycles. Le cycle d’après lequel ils comptent les années de leur histoire est le cycle de 60 ans [84], dont font usage plusieurs peuples de l’Orient.

Le lord McCartney [85], dans la relation de son ambassade en Chine, nous dit que l’an 1 800 de notre ère était la cinquante-septième du soixante-huitième cycle chinois, ce qui fait remonter le commencement de ce cycle à 2 277 avant notre ère, c’est-à-dire à l’époque du règne d’Yaô, sous lequel furent faites les observations solsticiales et équinoxiales que nous avons remarquées dans notre tableau.

Si nous retranchons de ce nombre 388 ans qui s’étaient écoulés depuis que le colure équinoxial de printemps avait quitté gamma du Bélier où commence la division du cercle gradué, et si nous réduisons le reste en degrés, à raison de 72 ans, nous aurons le point initial du cycle à 26° 14’ 10" d’Aries, c’est-à-dire près de 30° ou 2° 54’ 10’’ plus loin que l’équinoxe indien qui répond à 23° 20’ sur le cercle, ou au 10° de Bharanī. Ce qui donne en temps environ 213 ans de plus d’ancienneté sur l’observation du Surya Siddhanta, laquelle n’est que de 2 064 avant notre ère. L’équinoxe était au 26° 15’ environ d’Aries et les deux maisons Ashvinī et Bharanī forment ensemble 26° 40’. Il ne s’en fallait donc que 25’ qu’il ne fût hors Bharanī et entré dans Krittikā, ou dans le troisième natchtron qui comprend les Pléiades et qui correspond à une partie de Mao, dix-huitième maison ou sou de la division chinoise qui comprend aussi les Pléiades. Il était donc déjà entré dans Mao, dont le commencement répond aux derniers degrés de Bharanī. C’est exactement la position qu’il avait sous Yaô [86], sous lequel on fait commencer le premier cycle.

L’histoire dit que sous ce prince [87], qu’on regarde comme le fondateur de l’astronomie chinoise [88], ou au moins comme le restaurateur, l’équinoxe de printemps était dans la constellation Mao ou dans le dix-huitième sou, le solstice d’été dans la constellation Sing, ou le vingt-cinquième sou, l’équinoxe d’automne dans la constellation Fang ou le quatrième sou, et le solstice d’hiver dans la constellation Heu ou le onzième sou. On voit donc que ces quatre points cardinaux ou les colures répondent aux mêmes points qui nous sont donnés par le calcul du cycle, dont nous avons parlé plus haut. Ainsi la chronologie et l’astronomie sont exactement d’accord chez les Chinois qui, dès la plus haute Antiquité, ont lié la marche des événement humains à celle du temps et des cieux.

Nous avons marqué sur notre tableau par des lignes ces quatre points, comme ils ont été déterminés par les observations faites sous le règne d’Yaô.

Ces observations nous fournissent les mêmes arguments que celui que nous avons tirés des observations du Surya Siddhanta pour conclure la position primitive, parce que, comme ces dernières, elles sont rapportées aux maisons lunaires et que les colures ne coïncident pas non plus avec le point initial de la division chinoise ou avec Kio, premier sou. En faisant mouvoir la croix, ou étoile mobile, on verra que ses quatre extrémités passent par ces quatre constellations et marquent sur le cercle gradué des points plus éloignés de nous que ne le sont ceux qu’elle marque quand elle est placée sur les quatre points indiqués par les observations des Indiens. Plus de 2 200 ans avant notre ère, ou plutôt à l’époque du commencement du cycle 2 277 ans avant l’ère vulgaire, les Chinois connaissaient l’année de 365 jours un quart, si nous en croyons le père Souciet [89] ; c’est ce qui résulte de la nature même de leur cycle. Cette année était solaire, et elle se comptait d’un solstice d’hiver à l’autre [90]. Tous leurs astronomes fixaient le commencement de leur Zodiaque [91] à un des degrés de la constellation Heu, à laquelle répondait le solstice d’hiver au commencement de leur cycle de 60 ans, et sous le règne d’Yaô.

Sphère céleste chinoise
Leur calendrier rédigé avant Yaô, sous Huang-ti, remonte à 2 686 avant notre ère. Mais, Souciet soupçonnant qu’il n’est pas d’une date aussi ancienne, nous n’avons point fait entrer dans notre tableau cette époque [92].

C’est à-peu-près de la même époque que date, chez les Chinois, la connaissance des armilles ou des sphères [93], de même qu’une observation de l’étoile alpha du Dragon, alors étoile Polaire.

Nous avons marqué sur notre tableau le lieu du colure du printemps à l’époque de cette ancienne observation qu’on fait remonter à 2 697 avant notre ère [94].

Nous avons aussi marqué le lieu de ce même colure équinoxial lors de l’observation de l’éclipse du Soleil vue à Pékin l’an 2 155 avant notre ère [95], près de 100 ans avant l’observation des équinoxes et des solstices rapportée dans le Surya Siddhanta.

Nous n’avons noté que cette éclipse parce qu’elle est la plus ancienne dont il soit parlé dans l’histoire des Chinois [96].

Nous n’avons point noté celle de 776 [97] qui correspond à la première année de la première Olympiade des Grecs, ni beaucoup d’autres pour ne pas charger le tableau. Cependant il en serait résulté un avantage, celui d’avoir sous les yeux la série continue d’observations faites à diverses époques chez un peuple qui, de tout temps, a attaché la plus grande importance à l’astronomie [98] parce qu’elle se liait à son histoire, comme elle aurait dû se lier à celle de tous les peuples.

On trouvera chez le père Souciet cette série d’éclipses ainsi que la table des observations du solstice d’hiver faites à diverses époques.

Non seulement les Chinois connaissaient, dès la plus haute antiquité, la durée de l’année solaire, le cycle de 19 ans qui ramène les mêmes conjonctions aux mêmes points du ciel, les années bissextiles, mais ils connaissaient encore la précession des équinoxes qu’ils faisaient, comme nous, d’un degré environ en 72 ans [99].

Quant aux Perses, nous avons un monument subsistant de l’antiquité de leur astronomie qui fixe d’une manière claire le lieu du colure, des équinoxes, au Taureau et au Scorpion, et celui du solstice d’été au Lion. Ce monument est le fameux monument de Mithra que nous avons expliqué dans notre grand ouvrage [100]. Certes, on n’y aurait pas désigné l’équinoxe de printemps par l’effigie du Taureau si le colure équinoxial n’eût point passé par ce catastérisme car, dans les siècles postérieurs, où le colure rétrograda et passa par Aries, on a substitué le Bélier au Taureau, comme on peut s’en assurer par le monument mithriaque qui se trouve sur le portique d’un temple dans la ville d’Amiens. Là, on a conservé les précieux restes de cet ancien culte. Si le Lion y paraît encore avec l’Hydre, ce n’est plus comme constellation solsticiale, puisque le Cancer était alors au solstice d’été, mais comme signe affecté pour domicile au Soleil, de même qu’Aries l’était à son exaltation. Le Lion et l’Hydre sont placés sous les pieds d’une figure qui semble tenir un globe comme dans certains monuments mithriaques que nous avons fait graver. Les images du Soleil et de la Lune, l’une à droite, l’autre à gauche, sont en haut comme dans tous les monuments mithriaques.

On y retrouve aussi la division de l’année en six mois de bien et de lumière, et six mois de mal et de ténèbres, et la distinction du double domaine des deux principes, l’un à droite, l’autre à gauche. C’est à gauche que l’on voit l’arbre d’hiver dépouillé de feuillage, auquel est attaché le flambeau renversé qui se trouve dans tous les monuments de cet ancien culte du Soleil Mithra, et c’est à droite qu’est l’arbre vert, couvert de feuillages, aux branches duquel sont suspendues deux lampes allumées, au lieu du flambeau élevé. Non seulement le mois qui répond à chaque équinoxe y est caractérisé d’un côté par le flambeau renversé et de l’autre par la lampe allumée, comme dans tous les monuments mithriaques que nous connaissons, mais encore les dix autres mois y sont caractérisés par des lampes allumées et droites pour les six mois de printemps et d’été et par des lampes renversées pour ceux d’automne et d’hiver. C’est un des monuments les plus précieux que je connaisse, puisqu’il nous montre la filiation des cultes par le changement de symboles et par la substitution d’Aries à Taurus, qui eut lieu dans les siècles postérieurs à l’époque à laquelle le Taureau occupait l’équinoxe de printemps, substitution que nous avons dit [101] avoir dû exister, et cela avant de connaître ce monument.

On trouve aussi sur un petit portail les douze signes du Zodiaque avec les tableaux qui les accompagnent sur le portail de Notre-Dame de Paris, de l’église de Saint-Denis, de celle de Strasbourg et sur les heures de la Reine Anne de Bretagne.

Les Perses, encore aujourd’hui, conservent des traces de la priorité du Taureau sur les autres signes à l’époque où furent composés les monuments mithriaques qui ont été copiés ensuite par les peuples d’Occident, assez ignorants pour retracer une position céleste qui de leur temps n’existait plus. Les Perses, donc, qui, autrefois, marquaient l’ordre numérique par les lettres de l’alphabet, appelaient et appellent encore A, le Taureau, B, les Gémeaux [102].

A, ou le Taureau, ayant été le premier des douze signes, nous sommes donc autorisés à y faire passer le colure, ainsi que par le Scorpion qui lui est opposé et qui est à l’équinoxe d’automne, désigné par le flambeau renversé, quand le Taureau est à l’équinoxe de printemps, désigné par le flambeau élevé, ou par la lampe allumée et suspendue à l’arbre couvert de feuillages.

Nous pourrions faire venir à l’appui des raisons qui nous autorisent à faire passer les colures par le Taureau et le Scorpion, d’un côté, par le Lion, et le Verseau de l’autre, l’observation que les Perses firent de quatre grands astres qui veillaient sur le point initial de chaque saison et aux quatre coins du ciel [103].

Ces astres étaient Taschter, qui gardait l’est, Satevis, qui gardait l’ouest, Venand, qui gardait le midi, et Hastorang, qui gardait le nord.

M. Bailly fait remonter à 3 000 ans avant notre ère cette fixation. Il voit dans Taschter Aldébaran, ou l’œil du Taureau, qui 3 000 ans avant l’ère vulgaire était au point équinoxial de printemps. Nous avons de cette étoile une observation qui remonte encore plus haut et qui la place à 4° 43’ en-deçà du colure équinoxial. Nous en parlerons bientôt.

Le second astre est, suivant lui, Antarès, ou le cœur du Scorpion, qui lui est diamétralement opposé, ou qui diffère de lui de 6°01’ en longitude. Il devait, par conséquent, occuper le point équinoxial d’automne, quand Aldébaran occupait celui de printemps

Le troisième est Regulus , ou le cœur du Lion, qui n’était pas très éloigné du colure solsticial ou du point du solstice d’été et que M. Bailly [104] y place 2 300 ans avant notre ère, à-peu-près à l’époque d’Yaô.

Le quatrième serait Fomalhaut, ou la belle étoile du Poisson austral, qui fait partie du Verseau, par lequel passait le colure solsticial au point d’hiver, quand le Lion était au tropique d’été. Il n’était guère éloigné du colure que de 6 à 7 degrés.

Les douze signes du zodiaque, 
en coupole au dessus de Mithra
Ainsi, ces quatre astres auront très bien pu être pris pour les gardiens des points solsticiaux et équinoxiaux, et alors ce sont les mêmes constellations équinoxiales et solsticiales que désignent les anciens monuments du culte mithriaque. Cependant, parce que ce ne sont point des observations directes, nous n’en avons pas fait usage, non plus que de la chronologie persane qui s’accorde avec ces positions. On la fait remonter à 3 500 avant notre ère [105], ce qui place les colures des équinoxes vers 13 ou 14° de la constellation du Taureau [106]. Comme nous ne nous appuyons pas sur la chronologie pour composer notre tableau, qui doit au contraire la rectifier, nous n’en avons pas fait non plus usage. Si nous en parlons, c’est pour faire voir qu’au moins elle s’accorde aussi avec le monument mithriaque, dont nous avons placé l’époque au plus bas.

Tandis que les Perses, qui adoraient le Soleil sous le nom de Mithra, lui élevaient des monuments, et que les Indiens faisaient ses légendes sacrées, les Grecs, non pas ceux qui nous sont connus par l’histoire mais ceux dont les prêtres de Saïs parlèrent à Solon [107], composaient en son honneur des poèmes et célébraient ses douze travaux sous le nom d’Hercule, sa navigation et sa victoire sur des taureaux qui vomissaient des flammes et qui gardaient la fameuse toison d’un Bélier, sous le nom de Jason, ses voyages et ses conquêtes sous le nom de Bacchus, etc. Car tous ces poèmes supposent les colures aux même points qui nous sont indiqués par le monument mithriaque, comme on peut le voir dans l’explication que nous avons donnée de ces différents poèmes [108]. Le premier travail d’Hercule, par exemple, est sa victoire sur le Lion de nos constellations. Donc il était le premier signe, et il occupait le solstice d’été, puisque l’année olympique des Grecs partait de ce point.

Donc, l’astronomie et la poésie fleurissaient alors en Grèce. Car on ne peut pas supposer que ces poèmes aient été faits ailleurs quand on voit que toutes les rivières, les montagnes de la Grèce et les villes les plus anciennes y sont nommées. C’est vers ces temps éloignés que remontent les calendriers qui, plus de 1 400 ans après, furent publiés sous le nom d’Hésiode. On y trouve des observations des Pléiades [109] qui datent de la même année que les observations faites en Chine sous Yaô, et du commencement du cycle chinois. En effet, suivant les calculs de Petau [110], elles remontent à 2 278 ans avant notre ère, ou à une année avant le commencement du cycle chinois que nous avons vu dater de 2 277 avant l’ère vulgaire. Cet accord est étonnant entre les époques de ces calendriers et les observations de la Grèce et de la Chine. Ces calendriers auraient-ils été empruntés par les Chinois et les Grecs du calendrier d’un peuple intermédiaire, soit des Chaldéens, soit des Indiens? Je l’ignore, mais un tel accord semble appartenir à un même auteur plutôt qu’à des observations simultanées en des pays aussi éloignés. Mais quel est cet auteur?

Cette date du calendrier grec, qui coïncide si parfaitement avec celle du calendrier chinois, nous l’avons marquée par une même ligne dans notre tableau.

On a d’autres observations des Pléiades qui sont postérieures à celle-ci, environ d’un degré ou de 78 ans, et que le père Petau rapporte à l’an 2 200 avant l’ère vulgaire [111]. Elles se placent 136 ans au-dessus des observations du Surya Siddhanta et 77 ans au-dessous de celles de la Chine et de l’ancien calendrier grec.

Les observations chaldéennes, qui sont de 2 234, se trouvent placées presqu’au milieu entre cette observation des Pléiades de 2 200 et celle de 2 278, faite soit en Grèce, soit en Chine [112].

On sait que Callisthène, qui accompagna Alexandre dans ses conquêtes en Asie, envoya à Aristote des observations suivies faites à Babylone, qui remontaient à 1 903 avant l’arrivée d’Alexandre dans ce pays, ce qui place l’époque de ces observations à 2 284 avant l’ère vulgaire. Nous avons marqué dans notre tableau par une ligne le lieu de l’équinoxe de printemps à cette époque. Les Chaldéens avaient plusieurs périodes, telles que le sôsse de 60 ans, le nére de 600 et le sare de 3 600 ans, et ils en comptaient plusieurs révolutions, ce qui annonce une astronomie anciennement cultivée car on ne commence point par de telles périodes. Néanmoins, comme elles font partie d’une immense chronologie que je crois fictive, je n’en ai point fait usage.

Nous avons une observation des Pléiades encore plus ancienne que celle que nous venons de rapporter. Ptolémée marque le lever de ces étoiles 7 jours avant l’équinoxe d’automne.

Bailly [113] conclut qu’il fallait que cette constellation précédât l’équinoxe de printemps d’environ 10°, ce qui, selon lui, remonte à 2 997 ou près de 3 000 ans avant l’ère vulgaire. Nous avons marqué dans notre tableau par une ligne le lieu où passait le colure équinoxial à l’époque fixée par cet ancien calendrier.

Elle est absolument la même que celle que nous donne le livre de Job, d’après l’observation des mêmes Pléiades, qu’il nomme Chima [114] ; et Bailly la fait remonter à 3 000 ans avant notre ère. Il pense avec raison que Kima annonçait le renouvellement de la nature au printemps, c’est l’arbre couvert de fleurs, et que Kesil annonçait son engourdissement, c’est l’arbre qui va se dépouiller de son feuillage ; autrement, c’est le flambeau élevé et le flambeau renversé du monument mithriaque, ou astronomiquement, c’est le Taureau près duquel sont les Pléiades et le Scorpion qui lui dévore les testicules dans le monument de Mithra.

Les Pléiades sont appelées Kimo, les astres de la chaleur, par les Syriens [115]. C’est l’astre Mao des Chinois, compris dans le dix-huitième sou chinois, dans lequel les observations d’Yaô placent l’équinoxe de printemps. C’est le Tsouria des Arabes, le Perouez des Perses, qui, dans les maisons lunaires de ces deux peuples, occupent la troisième maison ; enfin c’est le troisième natchtron indien, ou Krittikā.

Le point opposé est, dans la division chinoise, la quatrième constellation, ou Fang, qui comprend une partie des étoiles du Scorpion, c’est-à-dire les étoiles auxquelles répondait l’équinoxe d’automne sous Yaô, quand celui de printemps répondait à Mao et aux Pléiades. Or, on voit effectivement que la maison lunaire qui y répond chez les Arabes, est Kelil, nom dont Kesil n’est qu’une variante, et Al Kelil n’est que ce nom avec l’article arabe car l’on peut dire également Al Kesil, comme on dit Al Kelil.

Plusieurs commentateurs du livre de Job, entre autres le savant professeur royal Vatable, ont bien vu que par Kima on devait entendre les astres de printemps ou les Pléiades, et par Kesil le Scorpion, remarquable par sa belle étoile Antarès désignée, suivant Bailly, dans la cosmogonie des Perses, comme l’étoile qui surveillait l’équinoxe d’automne.

Nous ne prétendons pas pour cela que le livre de Job remonte à une époque aussi éloignée mais son auteur a fait ce que souvent ont fait les Grecs, et en particulier Eudoxe. Il a fixé les colures là où ils n’étaient plus de son temps et là où les anciens livres, les anciennes traditions, les plaçaient.

Nous avons marqué cette époque dans notre tableau sur la même ligne, ou sur le colure, qui fixe l’équinoxe de printemps d’après l’observation de Ptolémée rapportée ci-dessus, et qui appartient au même calendrier, ou au moins à la même époque.

Mais de toutes les observations directes, car l’époque de l’apogée des tables indiennes est indirecte, la plus ancienne, excepté toujours le Zodiaque d’Esna, est celle d’Aldébaran, ou de l’œil du Taureau, qu’on prétend avoir été faite par un Chaldéen, nommé Hermès, né à Calovaz [116]. Elle est rapportée par M. Édouard Bernard [117].

Cette étoile fut observée à 4° 43’ en deçà de l’équinoxe, ce qui fait remonter l’époque de l’observation, suivant Bailly, à l’an 3 362 avant l’ère vulgaire, à 5 168 ans avant la présente année 1 806. Nous l’avons notée dans notre tableau seulement le dessinateur n’a pas placé assez bas l’œil du Taureau mais la ligne du colure, ce qui nous suffit, est à sa véritable place.

Le père Pezron place la fondation de Babylone à 3 244 ans de notre ère. Cette observation serait antérieure de 118 ans.

Cet Hermès avait passé en Éthiopie et en Égypte. Ainsi nous pouvons regarder cette ancienne observation comme appartenant aux Égyptiens.

Les Égyptiens nous fournissent encore d’autres époques. Nous avons plusieurs observations de levers de Sirius, entre autres une qui marque ce lever quatre jours après le solstice d'été ce qui, pour la Haute-Égypte, remonte suivant Bailly [118], à 2 550 ans avant notre ère, c'est-à-dire à l'époque la plus rapprochée que nous puissions supposer aux colures dans le monument de Mithra.

Zodiaque de Dendérah - Musée du Louvre, Paris
Photo : Didier Castille
Cette observation est rapportée par Ptolémée dans son calendrier météorologique [119]. Ptolémée en rapporte encore plusieurs autres qui remontent moins haut [120].

Hipparque [121] a fixé pour son temps ce lever 30 jours plus tard que le solstice d’été.

Bailly, d’après les calculs de Bainbrige, dit que le lever héliaque de Sirius n’a pu concourir avec le solstice d’été qu’environ 2 800 ans avant notre ère [122]. C’est à-peu-près à cette époque, ou à l’an 2 782 avant l’ère vulgaire [123], que commença la période sothiaque, qui se renouvela l’an 1 322 avant l’ère vulgaire, suivant Censorinus, comme nous l’avons fait voir dans notre dissertation sur le Phénix, lequel, suivant Synésius [124], était l’expression symbolique d’une période égyptienne.

Nous avons marqué par une ligne sur notre tableau, le lieu de l’équinoxe de printemps à l’époque de chacun de ces renouvellements.

Nous trouvons également en Égypte une observation de Regulus qui place cette étoile sur le colure même du solstice d’été.

Murtadi [125] l’a rapportée d’après Albumasar et d’après deux anciens livres égyptiens qui disaient que le monde avait été renouvelé après le déluge, lorsque Regulus était dans le solstice d’été. M. Bailly [126] observe que Regulus a dû se trouver dans le colure 2 300 ans environ avant notre ère, c’est-à-dire à l’époque même du règne d’Yaô, au commencement du cycle chinois, et à l’époque du calendrier grec publié sous le nom d’Hésiode. Voilà donc l’Égypte, la Chine et la Grèce qui se réunissent à fixer une même époque dans les fastes de l’astronomie. C’est sans doute le souvenir de cette époque, à laquelle Regulus était au point initial de l’année solsticiale et des signes descendants, qui l’a fait appeler le chef des mouvements célestes, Αρχή τών δρανιών, par les Chaldéens [127].

Nous avons confondu sous la même date et placé sous le même signe ces trois observations faites à la même époque en Grèce, en Chine et en Égypte. C’est là l’avantage de nos rapprochements dans ce tableau comparatif.

Lorsque les époques fixées par les calendriers ou Zodiaque de Dendérah et d’Esna seront bien déterminées, on pourra soi-même les marquer sur le tableau par des lignes semblables à celles que nous avons tirées. Mais il y règne encore assez d’incertitude, au moins pour nous, pour que nous n’ayons osé encore marquer d’une manière précise le lieu de l’équinoxe de printemps à ces époques. M. de Lalande le fixe pour celui de Dendérah, comme Eudoxe, au milieu des signes, nous, au 19° d’Aries. M. Nouet, savant astronome de l’expédition d’Égypte, qui a vu ces Zodiaques sur les lieux, les fait encore remonter plus haut que nous d’après des calculs et des données que nous ne pouvons avoir. Notre ami commun, M. Marcoz, de Chambéry, savant modeste, mon ancien collègue à la Convention et l’ami particulier du vertueux et malheureux Condorcet avec lequel il a vécu une année dans la maison de la courageuse madame Vernet où ce philosophe était caché, m'a communiqué récemment quelques recherches manuscrites que lui a données M. Nouet sur les Zodiaques de Dendérah et d’Esna.

J’espère que ces précieuses observations feront partie du travail des savants qui ont été de l’expédition d’Égypte, dont je devais être aussi. En attendant, qu’ils publient cet intéressant ouvrage, je ne laisserai pas ignorer au public l’opinion du savant astronome qui a vu et jugé ces monuments.

Le résultat des calculs de M. Nouet est que le Zodiaque de Dendérah remonte à 3 856 ans, c’est-à-dire à 2 056 avant notre ère, ou à l’époque donnée par le Surya Siddhanta, qui est de 2 064 ans [128], au 10° de Bharanī.

Ainsi les positions indiquées dans l’Inde par le Surya Siddhanta et en Égypte par le Zodiaque de Dendérah sont absolument de la même époque. Voilà une coïncidence assez remarquable.

C’est dans le seizième natchtron, Vishākhā, que le Surya Siddhanta fixe l’équinoxe d’automne. Ce natchtron comprend plusieurs étoiles de la Balance. M. le Gentil en compte jusqu’à douze. M. Nouet prend aussi pour le point équinoxial d’automne l’étoile kappa de la Balance, qui est à 7 signes 25’ de longitude ou 210° 25’.

Le seizième natchtron, Vishākhā, comprend effectivement cette étoile et s’étend depuis 200° jusqu’à 213° 20’ de longitude, comme on peut le voir dans notre tableau et dans les "Recherches asiatiques" [129].

Ainsi les calculs de M. Nouet donnent rigoureusement les mêmes positions des colures pour l’époque de Dendérah que celles que le Surya Siddhanta donne pour l’Inde. Il les place donc dans Bharanī, dans Āshleshā, dans Vishākhā et au 10° de Dhanistha. Aussi M. Nouet, sans s’être concerté avec moi puisque mon tableau était gravé et mon mémoire fait avant que j’eusse communication de son travail, remarque dans son mémoire manuscrit, que j’ai sous les yeux, que le colure du solstice d’été devait passer à cette époque par les étoiles de la crinière du Lion les moins avancées en longitude. C’est effectivement par là que nous avions fait passer et déjà graver dans notre tableau le point solsticial d’été, que le Surya Siddhanta place dans le neuvième natchtron, ou dans Āshleshā, où l’on voit que nous avons casé les étoiles de la crinière du Lion. En effet, on y voit cinq étoiles de la face et de la crinière du Lion. Le Gentil les appelle mu et epsilon de la tête du Lion. Ces étoiles ont, l’une, epsilon, 4 signes 17° 54’ 39" de longitude, l’autre, mu, 4 signes 18° 38’ 34", c’est-à-dire qu’elles sont éloignées de près de trois signes, ou d’un quart de cercle, de l’étoile par laquelle M. Nouet fait passer le colure de l’équinoxe d’automne, ce qui doit être.

Il est impossible de trouver un accord plus parfait, sans s’être entendu et sans avoir pris les mêmes bases, car c’est par le moyen du Zodiaque lunaire, dont M. Nouet n’avait pas de connaissance, que je suis arrivé au même résultat en cherchant les époques astronomiques, lui de l’Égypte et moi de l’Inde. Il s’appuie du Zodiaque de l’Atlas de Farnèse dont Passeri a donné l’explication dans le troisième volume de ses "Gemmæ astriferæ" et dont Bentley a inséré la figure dans son "Manilius". Le colure de l’équinoxe de printemps dans ce Zodiaque passe précisément par les mêmes étoiles où commence la division des maisons lunaires chez les Indiens, chez les Perses et chez les Arabes, et la sphère y a la position que nous appelons primitive sous le rapport des colures. La seule différence, et elle est d’une moitié de la grande période, c’est que, dans le Zodiaque de Farnèse, l’équinoxe de printemps, au lieu de celui d’automne, est celui qui coïncide avec le premier natchtron, ou avec le point initial de la maison lunaire chez les Arabes, chez les Perses et chez les Indiens.

Nous avons dit plus haut [130] qu’il n’avait pas été difficile aux anciens observateurs, avec un peu de constance, de s’apercevoir de la précession des équinoxes ou du mouvement rétrograde des colures, et de le calculer avec assez de précision. Nous avons même indiqué comment ils avaient dû s’en apercevoir.

M. Nouet prouve qu’effectivement les Égyptiens la connaissaient avant l’époque du Zodiaque de Dendérah et il le prouve par le Zodiaque d’Esna où les colures ne sont pas aussi avancés que dans celui de Dendérah. En effet, le colure solsticial passe dans les étoiles de la crinière du Lion dans le Zodiaque de Dendérah, et c’est entre la queue du Lion et les premières étoiles de la Vierge qu’il passe, suivant lui, dans celui d’Esna. Les constellations ascendantes sont, à partir du mur du temple, les Poissons, le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Cancer et le Lion. Les constellations descendantes sont, à partir de l’entrée du péristyle au mur du temple, la Vierge, la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau.

D’après cette disposition, le solstice d’été, continue M. Nouet, se trouve exactement entre les constellations du Lion et de la Vierge. C’est précisément la position que nous donne le Zodiaque indien imprimé dans les "Transactions Philosophiques" de 1 772 et à la fin du volume de "l’astronomie ancienne" par M. Bailly. Les douze constellations du Zodiaque y sont rangées autour d’un quadrilatère de manière que le Soleil montant part des Poissons, qui sont au bas de la colonne de droite, et qu’en descendant il part de la Vierge, qui est au haut de la colonne de gauche. M. Nouet estime le mouvement rétrograde des colures, depuis cette époque, d’un quart de la révolution des fixes, ou de trois signes entiers, ou, pour parler dans le style énigmatique des prêtres d’Égypte, le Soleil a changé depuis cette époque une fois son lever et son coucher, ou plutôt son est et son ouest. En effet, à cette époque éloignée, les trois signes affectés à l’est, en partant du solstice, ou les trois signes d’été, étaient la Vierge, la Balance et le Scorpion.

Aujourd’hui ce sont ceux d’automne puisque le colure équinoxial actuel répond où passait alors le colure solsticial. Ils sont donc transportés dans le quart de cercle appelé sud.

Aujourd’hui, ceux de l’est, ou ceux que parcourt le Soleil, après avoir atteint le solstice d’été, ou les trois signes d’été actuels, sont les constellations des Gémeaux, du Cancer et du Lion, qui étaient alors celles du nord, il y à 6 500 ans.

On en dira autant des constellations de l’ouest, qui, à cette époque éloignée, étaient les trois premiers signes ascendants, savoir les Poissons, le Bélier et le Taureau, ou les trois constellations d’hiver, qui sont devenues celles du nord ou du printemps et qui ont été remplacées par le Sagittaire, le Capricorne et le Verseau.

C’est ainsi qu’on peut dire, en style énigmatique, que le Soleil a changé son est et son ouest une fois depuis l’époque indiquée par le Zodiaque d’Esna et par celui de l’Inde, qui remonte précisément au même siècle, comme les Égyptiens ont dit qu’ils en avaient changé deux fois en 13 000 ans.

Voilà donc le monument d’Esna d’accord avec un monument de l’Inde, comme celui de Dendérah, qui est de 2 550 ans postérieur, se trouve d’accord avec l’époque consignée dans le Surya Siddhanta. Il existait plus de 1 200 ans avant l’époque des pyramides, aussi le temple d’Esna porte-t-il des caractères d’une haute antiquité.

M. Nouet remarque que ce temple se trouve entièrement sous la ville, par l’amas successif des débris de maisons qui se sont succédées pendant une longue suite de siècles. Il ne reste plus qu’une ouverture en avant du péristyle, par laquelle on descend les décombres des environs, et dans quelques siècles on perdra le souvenir d’un temple entièrement conservé et enseveli sous terre.

Quelqu’éloignée que soit cette époque, elle n’est pas encore celle de la coïncidence des colures avec le commencement des natchtrons indiens et des sou chinois, puisque le Zodiaque d’Esna fait passer le colure par la tête de la Vierge et par les Poissons et que la division primitive exige qu’ils passent par les pieds de la Vierge et par la tête du Bélier, ce qui remonte encore à 1 900 ans plus haut, et même à 8 400 ans, si c’est du colure équinoxial que la division est partie comme nous le pensons. Cette distance, dont la position donnée par le Zodiaque d’Esna est de celle que nous appelons primitive, parce qu’elle passe par le point initial de la division des vingt-huit maisons arabes, persanes et chinoises, et des vingt-sept natchtrons, deviendra sensible à l’aide de l’aiguille, ou croix mobile, dont on placera une extrémité sur le cou de la Vierge, c’est-à-dire sur la ligne marquée EA ou sur l’équinoxe d’automne actuel ; l’intervalle qui sera toute la constellation de la Vierge jusqu’à la pointe de la croix gravée et fixée, nous donnera la mesure du chemin qu’avait fait le colure depuis qu’il s’était trouvé dans la position primitive et que la croix mobile avait été la dernière fois confondue avec la croix fixe. Je dis la dernière fois car elle avait pu l’être 6 500 ans auparavant, si la branche de la croix, qui touchera d’un côté les pieds de la Vierge et de l’autre la tête du Bélier, est le colure équinoxial.

C’est le tableau abrégé des dates astronomiques prises depuis la Chine jusqu’en Grèce, c’est-à-dire dans tout l’Orient et en Europe, ainsi qu’en Égypte dans les siècles les plus éloignés, et dont la plus rapprochée est celle du Surya Siddhanta, que nous mettons sous les yeux des amis de la Philosophie et de la Science ancienne, car c’est pour eux seuls que nous écrivons. Nous citons les autorités dont nous nous appuyons, et ce sont des savants estimables et connus par leurs lumières ainsi que des monuments bien authentiques. Ce sont les calculs de Petau, des PP. Gaubil et Souciet, de Bailly, de Fréret, etc., que nous suivons. Il n’y a presque rien de nous que les rapprochements mais ces rapprochements, faits pour la première fois, sont tout. En effet, tant que les diverses parties du tableau sont isolées, elles sont presque nulles pour les conséquences qu’on doit en tirer : rapprochées, elles jettent de toutes parts des rayons de lumière qui nous éclairent dans l’étude de l’antiquité.

Il est curieux d’envisager d’un seul coup d’œil l’antique et immense chaîne qui lie le système général des connaissances astronomiques sur une grande partie du globe, d’en apercevoir la filiation, d’en saisir les rapports et de se former une idée juste de l’état de la science astronomique, et par une conséquence assez naturelle de celle des arts et des autres connaissances humaines, dans des siècles où l’on prétend que les hommes étaient à peine réunis en société, au moins venaient d’éprouver une destruction presque générale. On voit au contraire que les beaux temps de l’astronomie, ceux des fictions poétiques et des monuments religieux auxquels l’astronomie a servi de base, remontent à 4 700 ans au moins avant notre ère, qu’à cette époque on trouve de magnifiques temples chargés des caractères de la science et marqués au coin de la grandeur. C’est surtout dans tout l’espace des temps que le colure équinoxial a mis à rétrograder des premières étoiles des Gémeaux jusqu’aux Pléiades, c’est-à-dire à parcourir, par son mouvement lent et rétrograde, toutes les étoiles du Taureau, que nous voyons se réunir les observations astronomiques chez les peuples les plus éloignés, et souvent ces observations, par leur coïncidence, fixer une même époque astronomique chez tous les peuples et les rapprocher en quelque sorte les uns des autres.

On a vu, par exemple, la Chine et la Grèce dater leur calendrier de la même époque astronomique [131], époque conservée aussi chez les Égyptiens par une observation de Regulus placé au colure solsticial, et chez les Chaldéens, par la dénomination de chef des astres ou des mouvements célestes, donnée au même Regulus. On a vu également les Zodiaques d’Égypte, sculptés à des époques très éloignées, s’accorder avec les positions données par le Zodiaque indien des transactions, et par le Surya Siddhanta. Ce sont des rapprochements qui n’ont pu se faire que par un tableau comparatif, tel que celui-ci. Quelles conséquences, quelles pensées doivent se présenter à l’esprit ! Je les abandonne à la sagesse du lecteur, placé d’un côté entre les dates du ciel et de l’astronomie, et de l’autre, entre celles de nos chronologistes et de nos historiens : je n’ai pas dit de la terre car c’est dans son sein qu’on doit chercher les dates de son antiquité et de ses révolutions. Le monde n’est jeune que pour les historiens, parce que l’histoire, au moins celle qui nous reste, est moderne, et que le temps chaque jour nous fait oublier les événements anciens et en ensevelit les monuments sous les ruines de plusieurs milliers de siècles.

II m’eût été facile de faire ressortir cette différence qui exista entre les dates de la chronologie historique et celles de la chronologie astronomique en marquant sur le cercle gradué le lieu qui répond aux équinoxes, aux époques que supposent ces dates fournies ou supposées par nos historiens. Mais j’aurais trop chargé le tableau et c’est un travail que chacun peut faire à l’aide de la méthode que nous avons indiquée plus haut [132]. On les trouvera pour la plupart placées au-dessous de la ligne qui détermine le lieu de l’équinoxe de printemps chez les Indiens, marqué sur le tableau d’après le Surya Siddhanta.

J’invite même le lecteur à faire ce travail, ce sera le moyen de rendre ce tableau plus complet, plus utile et de lui faire naître à lui-même des réflexions qui nous auraient échappé ou que nous n’aurions pas cru devoir faire.

Si l’étude de la chronologie peut trouver dans ce tableau des lumières que ne lui fournit pas l’histoire, celle de la mythologie n’en tirera pas moins de secours. Notre clé astronomique, que nous avons déjà employée dans l’analyse des poèmes sacrés, des fables religieuses et des monuments du Sabéisme, va devenir beaucoup plus parfaite par le tableau comparatif des maisons ou des stations de la Lune, laquelle, sous des noms aussi variés que ceux du Soleil, joue le plus grand rôle dans la mythologie de tous les peuples.

Cette clé devient surtout nécessaire pour l’explication des fables indiennes, qui souvent se sont reproduites avec des caractères peu différents dans la mythologie des Grecs. Cette filiation, ou au moins cette ressemblance, a été déjà reconnue par plusieurs savants et surtout par ceux de l’académie de Calcutta.

Il suffit pour se convaincre des rapports qu’ont avec le ciel et les astres la plupart des fictions indiennes, exceptées celles qui ont évidemment pour objet les êtres moraux et les êtres métaphysiques qui figurent avec les êtres astronomiques et physiques dans toutes les mythologies, de jeter un coup d’œil rapide sur les histoires sacrées des Indiens.

On trouve à leur tête la généalogie des Enfants du Soleil et de ceux de la Lune, dont l’histoire est si merveilleuse, et la durée de la vie si prodigieuse, qu’il est impossible d’y voir une histoire de rois, de princes ou de brâhmanes, enfin d’hommes. Dans cette généalogie monstrueuse, on y reconnaît toutes les planètes sous leurs noms connus dans l’Inde telles Shukra ou Vénus, Budha ou Mercure, Bhrihaspati ou Jupiter, Mangala et Angâraka ou Mars, et Shani ou Saturne. Chacune donne son nom à un des jours de la semaine dans l’ordre que nous connaissons. Les étoiles de l’Ourse y sont appelées les sept Richys et les sept Patriarches [133], ou les Septarchies [134].

Chaque mois a aussi son patriarche de même que chaque signe chez les Chaldéens avait un grand dieu qui y présidait, comme nous avons vu plus haut [135].

Les neuf planètes-divinités indiennes : Sûrya, Chandra,
Mangala, Budha, Bhrihaspati, Shukra, Shani, Rahu, Ketu
13ème siècle - British museum, Londres
Le Soleil prend des noms variés dans chacun des mois de l’année. Ce sont les douze Adyties, qui ne sont autre chose que l’emblème du Soleil et les formes dans chaque mois de l’année. Les Égyptiens prétendaient aussi que les images du Soleil variaient dans chacun des douze signes [136]. Ces formes chez les Indiens sont souvent celles que prend Vishnu, qui est le nom d’un des Adyties. On en verra un exemple bientôt dans son incarnation en Poisson oxyrhynque ou à longue corne, Poisson du Nil adoré en Égypte.

On lui composait sa cour et son cortège, dont les vingt-huit natchtrons et les ruthus, ou saisons de deux mois, faisaient partie.

Comme souvent on ne comptait que pour une saison les deux dernières ou celles d’hiver, on le représentait avec cinq pieds au lieu de six.

Souvent on ne donnait qu’une roue à son char mais cette roue avait douze rayons et le char tournait autour du Mont-Mérou, ou du pôle et de l’axe du monde appelé de ce nom.

On désignait le plus souvent le Soleil sous les noms d’Aditya et de Sûrya. On supposait que plusieurs fois il était descendu de son char pour prendre la figure humaine et sauver les hommes comme dans son incarnation en Krishna [137].

La Lune se nommait Chandra. On lui donnait vingt-sept femmes car on la faisait mâle. D’autres disent vingt-sept filles. On dit que Chandra, ayant été condamné à mort, obtint le droit de renaître après sa dissolution, ce qui convient parfaitement à la Lune qui, tous les mois après la déperdition successive de sa lumière, renaît encore le mois suivant, et comme Isis rassemble les membres épars de son époux ou, sans figure, les feux ou rayons de lumière que lui envoie le Soleil, son époux Osiris ou O-Sûrya.

Sparsos recolligit ignes

Ailleurs, ces vingt-sept maisons, ces vingt-sept jours, s’appellent les vingt-sept filles de Dacka ou de Tacchin, et les compagnes de Soma, qui est un autre nom de la Lune [138]. On fait de ce Chandra le roi des végétaux pour désigner l’influence de la Lune sur les productions de la terre. Il témoigna une amitié de préférence à une de ses femmes, à Rogami, ou Rohinī . C’est le nom du quatrième natchtron ou des Hyades, lieu de l’exaltation de la Lune, que les Coptes [139] appellent la grande maison d’Horus ou du printemps, et à laquelle ils font présider l’ange Hyaiel, nom formé de celui des Hyades.

L’amour, fils de Vénus, déesse du printemps et qui a son exaltation aux Poissons, avait pour ami vasanta, ou le second ruthu qui commence aux Poissons. Son attribut était un poisson, c’est-à-dire la constellation dans laquelle commençait la saison vasanta, comme on peut le voir dans le tableau.

Je n’entrerai pas dans de plus longs détails sur les fictions indiennes qui ont des rapports incontestables avec les corps célestes personnifiés et mis en scène poétique. Je ne puis donner ici qu’un aperçu très succinct du résultat de mes recherches sur les cosmogonies et sur les théogonies anciennes.

Ce que j’en ai dit ici suffit pour m’autoriser à chercher dans le ciel, dans le Soleil, dans la Lune, dans les astres, planètes ou fixes, l’origine ou le sens de beaucoup de fictions sacrées des peuples de l’Inde.

C’est là ce que proprement les Indiens appellent leur astronomie poétique et allégorique qui, suivant eux, ne doit pas être confondue avec la véritable astronomie [140] ou avec l’astronomie pure. Ils disent qu’il ne faut pas confondre le langage des Djyantichicas, ou astronomes mathématiciens, avec celui des Pouranichas, ou des fabulistes poétiques, que c’est uniquement à cette confusion qu’il faut imputer les erreurs nombreuses des Européens au sujet des sciences indiennes.

Les partisans des Pouranas [141], qui soumettent toute la nature à un système de mythologie emblématique, supposent qu’une nymphe céleste préside à chacune des constellations et que le dieu Soma, ou Lunus, ayant épousé douze d’entre elles, donna naissance à douze génies, ou mois, qui portent le nom de leurs mères. Effectivement, ces noms se tirent des douze natchtrons où la Lune de chaque mois est pleine. Tel est le sens de cette allégorie.

C’est parce que le génie poétique personnifiait ainsi tout dans l’Univers que Chumonton, dans l’Ezour-Vedam, reproche à Biache, qui parle d’après les fictions sacrées de l’Inde, d’avoir donné des figures d’hommes au Soleil, à la Lune, aux étoiles et de les avoir personnifiés. C’est un pareil reproche qui a été fait aux Grecs et aux Romains par les ignorants adversaires de leurs fictions sacrées, qu’eux-mêmes n’entendaient pas assez pour les défendre et pour expliquer les allégories qu’elles renfermaient. Après avoir bien caractérisé ici le génie poético-allégorique qui a donné naissance à ces fables des Indiens, et qui a servi de principe de composition aux statues souvent bizarres de leurs divinités, nous allons prouver par quelques exemples l’usage qu’on peut faire de notre tableau pour les analyser.

Les Indiens ont leur dieu Kartikeya, qu’ils représentent ayant six visages et assis sur un paon. Dans chacune de ses mains est un attribut du dieu de la guerre.

Il suffit de jeter un coup d’œil sur notre tableau pour reconnaître que ce dieu est le génie qui préside au troisième natchtron, qui contient les Pléiades, et qu’on nomme Krittikā, celui qui donne son nom au mois marqué par le coucher des Pléiades et dans lequel était pleine la Lune de la fin d’octobre.

On verra que les étoiles qui répondent à ce natchtron sont au nombre de six, c’est l’hexastron des Pléiades [142], et que le paon est l’oiseau affecté à ce natchtron. Les Pléiades sont sur la fin de la constellation du Bélier, domicile de Mars, dont le signe caractéristique accompagne l’animal céleste, Bélier, gravé dans ce tableau. Telle est l’origine des attributs militaires qu’on lui donne. C’est ainsi que, dans la sphère de Bianchini, le premier décan du Bélier, qui est affecté à la planète de Mars, est représenté avec une arme. C’est une hache et il est placé sous la planète de Mars, qui a la pique.

Les six faces représentent les six étoiles des Pléiades car, quoiqu’on en compte souvent sept dans les écrits des poètes, on n’en voit véritablement que six [143]. Quœ septem dici, sex tamen esse solent

Aussi les brâhmanes ne mettent-ils dans ce natchtron que six Pléiades, comme on peut le voir dans notre tableau.

Hyde, dans son Commentaire sur Ulugh Beigh, nous dit que les Coptes les appellent les six astres [144].

Le Paon fut sans doute affecté à cette constellation parce qu’elle forme une espèce d’éventail semé d’étoiles comme la queue du Paon. Ce sont les yeux de l’Argus grec, aussi M. Jones reconnaît-il entre Argus et Kartikeya une grande ressemblance.

L’Argus indien accompagne une déesse qui a la plupart des caractères de l’Isis égyptienne ou de l’Io des Grecs, changée en vache, placée dans le Taureau céleste près des Pléiades et adorée comme Isis à tête de Taureau en Égypte.

La conjecture de M. Jones est fondée et le Kartikeya des Indiens est réellement l’Argus des Grecs, l’Argus aux cent yeux, surveillant de la Lune du Taureau appelée Io dans la langue des Argiens et Isis en Égypte. Voici l’explication de la fable de l’Argus grec, qui n’est qu’une copie de l’Argus des Indiens.

Io, Zeus et Junon
Pendant plusieurs siècles, lorsque l’équinoxe de printemps était dans le second natchtron ou dans Bharanī, la Lune ou la néoménie équinoxiale paraissait pour la première fois dans le Taureau céleste, un peu au-dessus des Pléiades ou de Krittikā. Voilà le surveillant d’Io ou de la Lune, car Io était le nom de la Lune dans la langue des Argiens. Les images de la Lune prenaient donc les formes du signe céleste où elle se montrait pour la première fois. Tant que les Pléiades n’étaient point couchées héliaquement, c’est-à-dire tant que le Soleil ne s’en était pas assez approché pour les absorber dans ses rayons, on voyait aux portes de la nuit ou au couchant les Pléiades aux six faces. Elles paraissaient veiller sur l’inégal cours des nuits qui, ce mois, portait les attributs de la constellation où elle avait pris naissance et du génie qui présidait au mois du Taureau. Mais lorsque le Soleil s’était assez avancé pour éclipser de ses feux les surveillantes d’Io ou les Pléiades, et pour les absorber dans ses rayons pendant quarante jours, comme le dit Hésiode [145], alors Io n’avait plus de surveillant. On la voyait parcourir le ciel en liberté et reprendre le mois d’après une nouvelle forme qui n’était plus celle du Bœuf.

Cette disparition des Pléiades arrivait au lever héliaque de Persée placé au-dessus d’elle, de Persée qui a tous les attributs du fils de la Pléiade Maia, ou de Mercure, fils d’une Atlantide, car il naissait de la conjonction du dieu du jour avec les filles d’Atlas. Comme Mercure, il a les talonnières, le pétase et il porte le harpé, ou l’instrument tranchant dont se servit Mercure pour couper la tête d’Argus. Voilà l’origine de la fiction qui suppose qu’un génie ailé, armé du harpé, ayant des talonnières et un pétase, tua les surveillantes ou le génie surveillant de la Lune ou d’Io, dans la forme de Taureau qu’elle prenait au printemps.

C’est là ce phénomène astronomique qui, pendant plusieurs siècles, tous les ans, fut observé et fut chanté par les Prêtres du Soleil et de la Lune. Voilà le sujet de cette fiction astronomique dont on trouve la clé dans notre tableau par les rapports qu’il offre entre le Kartikeya monté sur le Paon, ce gardien d’une déesse qui a tous les caractères de l’Isis égyptienne, et l’Argus des Grecs, gardien d’Io, qui devint l’Isis égyptienne, enfin d’Argus, dont les yeux furent placés sur la queue du Paon par Junon, tandis que les formes de vache qu’avait Io restèrent au signe céleste qu’elle avait quitté et près duquel brillent les Pléiades.

Macrobe a soupçonné les rapports qu’a cette fiction avec la marche du Soleil qui éclipse les étoiles de ses feux. Mais c’est à tort qu’il a étendu à toute la voûte azurée le nom d’Argus, qui ne s’applique ici qu’aux Pléiades ou aux astres du printemps, placés sur la fin de la constellation du Bélier et près du Taureau dans lequel toute l’antiquité a vu le signe ou la forme d’Io [146] ou de la Lune, qui y a son exaltation.

Persée porte une arme, par la même raison qui en fait donner une à Mithra en Perse [147] et à Kartikeya en Inde. C’est parce qu’il tient au domicile de Mars. On prétend que du commerce du dieu de la lumière avec Io ou avec la Lune, sous la forme d’Io, était né Épaphus, le même qu’Apis. Or, nous avons prouvé dans notre grand ouvrage qu’Apis, représenté par le Bœuf, qui portait sur l’épaule le croissant de la Lune, était un emblème relatif à la néoménie équinoxiale sous le Taureau céleste [148]. On peut consulter notre article [149]. C’est ce croissant qui est entre les cornes du Taureau dans le Zodiaque de Dendérah.

Cet Épaphus, fils d’Io, défie Phaéton ou le Cocher porte-chèvre qui suit Persée dans le ciel, comme la fable de Phaéton suit celle d’Argus dans Ovide. Nous avons fait remarquer ailleurs la liaison que devaient naturellement avoir entre elles ces deux fables [150].

Nous trouvons ici une nouvelle preuve de cette liaison qui prend son origine dans l’astronomie.

En effet, le même natchtron qui renferme le Paon que monte Kartikeya chez les Indiens, et dont la queue est semée des yeux d’Argus chez les Grecs, renferme aussi la Chèvre que porte le Cocher ou Phaéton, comme on peut le voir dans notre tableau. Elle est le quadrupède affecté au même natchtron, auquel est affecté l’oiseau Paon. Ovide, sans doute, ne savait pas que ces fables fussent liées entre elles par les mêmes rapports qui les unissaient dans le système astrologique des Orientaux, mais il suivait un ordre qu’y avaient mis les anciens mythologues, dont les ouvrages servirent de base aux siens.

Si l’on fait mouvoir le globe jusqu’à ce que le point équinoxial d’automne, alors au Scorpion, vienne se placer au méridien, on verra à la suite du Cocher passer successivement l’Ourse céleste, Arcas son fils, ou le Bootes au nord, et vers le midi le Corbeau, le centaure Chiron, enfin sur le point équinoxial même le Serpentaire Esculape. Ce sont là précisément les tableaux qu’Ovide nous présente successivement, et dans le même ordre, dans le second livre de ses "Métamorphoses". Il nous ramène au Loup céleste, constellation d’automne, d’où il était parti en décrivant la dégradation de l’espèce humaine et des âges, qui nécessita la destruction de l’ancien ordre de choses pour ramener un nouvel ordre au printemps suivant lorsque le Soleil devint amoureux du laurier, sous la forme duquel il métamorphosa Daphné. Cet événement suit le passage du Soleil au Verseau ou au signe d’hiver, dans lequel on plaçait Deucalion chez les Grecs, Tchuen-Heu chez les Chinois et Satyavrata chez les Indiens. Tout se tient dans cette série de fables, comme dans la succession des tableaux de la sphère.

Si nous passons au quatrième natchtron Roguemi ou Rohinī, nous reconnaîtrons qu’il est aussi le sujet de fictions sacrées chez les Indiens.

Ce natchtron renferme les cinq étoiles Hyades, dont la plus brillante est Aldébaran ou l’œil du Taureau. Le Serpent est l’animal qui lui est affecté et on sait que chez les Grecs Hyas, frère des Hyades, mourut piqué par un serpent [151], que Bacchus, nourri par les Hyades, avait aussi pour attribut le Serpent, que Proserpine était née des amours de Jupiter métamorphosé en taureau et qu’ensuite Jupiter, métamorphosé en serpent, l’avait rendue mère de Bacchus [152]. Nous avons expliqué cette fiction à notre article de la Couronne boréale.

Pareillement, le Bacchus indien [153] était fils de Rohinī ou des Hyades, nourrices de Bacchus. Dans la fable de l’incarnation de Vishnu en Krishna, ce dieu ne consent à prendre cette nouvelle forme, qu’autant que son Serpent s’incarnera au sein de Roguemi, ou de ce quatrième natchtron. On voit aisément qu’il fait allusion au Serpent qui est affecté à ce natchtron, par les raisons que nous avons données plus haut [154].

On observait avec grand soin dans l’Inde les conjonctions de la Lune avec Rohinī, ou son passage dans ce natchtron [155], comme on observait le retour de Saturne à ce même Taureau chez les anciens peuples de la Bretagne [156].

La néoménie qui arrivait à l’équinoxe de printemps, lorsqu’il était dans le second natchtron Bharanī ou Bhavani, tel qu’il est indiqué dans le Surya Siddhanta, devint la Vénus indienne ou la Déesse de la création, Bharanī ou Bhavani. Cette maison a dans notre tableau pour emblème l’Yoni, le principe passif ou l’organe féminin de la génération. On lui affecte l’Éléphant, comme on affectait la Chèvre et le Paon à Kartikeya.

Narsingha, dans le temple de Changu Narayan (Bhaktapur),
par Jean-Pierre Dalbéra sur FlickR 
On consacrait aussi l’Yoni à la Déesse Bhavani et l’on portait en pompe son image sur l’Éléphant.
On célébrait sa fête près des deux équinoxes, en mars et en septembre, sans doute parce qu’en mars elle était nouvelle dans ce natchtron et qu’elle y était pleine en septembre.

C’est ici l’occasion de parler de l’usage qu’on peut également faire de notre tableau pour trouver la raison de la célébration des fêtes indiennes, de leur objet et des cérémonies qui y avaient lieu. Il sera nécessaire pour cela d’examiner non seulement sous quel natchtron se célébrait la fête, mais encore sous quel signe du Zodiaque.

Ainsi l’on verra, du premier coup d’œil, l’origine de la fête de la Purification par l’eau qui a lieu au mois Māci, ou en février, le Soleil étant au Verseau et la Lune étant pleine dans le neuvième natchtron, ou dans Āshleshā, ancien solstice d’été. Ce natchtron répond aux étoiles du Lion. C’est la fête de Narsingha ou du dieu aux formes de Lion. On y prie aussi pour les morts. C’était aussi le mois des expiations chez les Romains, qui ont beaucoup emprunté, ou plutôt Pythagore pour eux, du Kali des Indiens, ou de leur connaissance du temps, quoiqu’ils aient plutôt pris pour règle les levers et les couchers d’étoiles. C’était aussi en Mekhir chez les Égyptiens que se faisaient les lustrations [157].

La Lune qui avait été pleine dans le neuvième natchtron, le lendemain se trouvait au dixième natchtron Maghā. C’était sous ce natchtron qu’on célébrait la fête dont nous venons de parler. C’était donc dans le natchtron opposé à Āshleshā que se trouvait le Soleil le jour de l’opposition. Ce natchtron est Dhanistha, ancien solstice d’hiver. Sept jours après, ou dans sa quadrature, elle se trouvait près l’étoile Rhoini, dont on observait si soigneusement la conjonction avec la Lune. Sous Rohinī, on voit dans notre tableau pour emblème un Chariot, vraisemblablement celui que conduit le cocher Phaéton placé au-dessus et qui se lève avec Rhoini. Le septième jour après cette nouvelle lune, ou dans sa quadrature, le calendrier indien marque la fête de Randan Satami ou septième. On y fait Pongol pour le Char du Soleil, et Randan signifiant Char [158].

Voilà donc des fêtes qui ont des rapports bien marqués avec les positions du Soleil et de la Lune dans les constellations du Zodiaque et dans celles des natchtrons qui y répondaient.

Au mois Tai, qui correspond à janvier, époque à laquelle le Soleil remonte vers le nord, le premier du mois, il y a Pongol. C’est la plus grande fête des Indiens qui y célèbrent la renaissance du Soleil et son retour vers le nord. Cette fête dure deux jours. Le premier jour est le Peroun Pongol ou grand Pongol. On fait bouillir du riz avec du lait et dès qu’il bout, on crie Pongol. Le lieu de cette cérémonie est purifié avec de la bouse de vache. On présente ce riz aux dieux et l’on en mange après.

Le second jour est le Maddou Pongol, ou Pongol des vaches. On peint les cornes de ces animaux, on les couvre de fleurs et on les fait courir dans les rues. Nous avons déjà rappelé le rapport qu’avait cette cérémonie à celle des Égyptiens qui faisaient faire sept fois le tour du temple à la vache sacrée à la même époque du solstice d’hiver, ainsi que les réjouissances auxquelles donnait lieu le retour du Soleil qui s’acheminait de nouveau vers nos régions boréales. En Inde, on jette des sorts pour connaître les événements de l’année qui commence. Le soir, on fait des visites et des souhaits, comme chez nous. Ces fêtes durent huit jours.

Dans le mois Addi, ou juillet, au onzième natchtron nommé Pūrva Phalgunī, qui répond à la fin du Lion, domicile du Soleil, on célèbre la fête d’Addi, ou du Soleil, en honneur de Pārvatī, la Cybèle des Indiens, que l’on promène dans un char. On sait que Cybèle présidait au Lion dans la classification des douze grands dieux dans les signes. Nous croyons que cette déesse pourrait être la Magna Mater, ou la Grande Ourse, le Chariot placé sur le Lion et qui passe avec lui au méridien. De là ce char et ces lions qui y sont attelés.

Et juncti currum Dominæ subiere leones. (Virg., Énéid. 3, V.113.)

Au moins est-il certain que les Crétois, qui adoraient les Ourses célestes ou les déesses-mères, leur avaient bâti en Sicile un temple à Engyum [159] que Cicéron dit être le temple de Cybèle, ou de Magnæ Matris [160] : il l’appelle aussi Idea mater. Il est également certain que Cybèle avait son temple à Cyzique, sur le mont des Ourses [161], ainsi appelé des nourrices de Jupiter, changées en ourses.

Il est aussi certain qu’on attribuait aux déesses-mères adorées à Engyum, ou aux Ourses célestes, le pouvoir d’inspirer la fureur, comme on l’attribuait à Cybèle [162], dont les prêtres partageaient ce délire furieux.

Mégalê, ou Magna, est aussi le nom de la Grande Ourse, comme celui de Cybèle, en honneur de laquelle on célébrait à Rome les fêtes appelées Mégalesia vers le 4 avril, époque à laquelle l’Ourse dépassait le méridien inférieur et remontait vers le zénith.

Dans le cirque où se donnaient les fêtes solaires, à Rome, on avait retracé les images de la grande et de la petite Ourse [163].

Tertullien dit qu’on y avait représenté la mère des dieux dans l’Euripos, ce qui rentre dans la même idée, à savoir que la mère des dieux et la Grande Ourse ne sont que la même divinité Magna Mater.

Porphyre appelle les Ourses célestes les mains de Rhéa ou de Cybèle [164].

La déesse Cybèle errait sur les montagnes, comme on voit aussi les ourses du côté du nord raser le sommet des montagnes sans se coucher. Callisto, changée en ourse, erre aussi sur les montagnes.

Buste de la déesse Pārvatī
La déesse Pārvatī des Indiens est aussi appelée souveraine des montagnes, déesse née des montagnes [165].

Je pourrais multiplier les traits de ressemblance qu’il y a entre la Pārvatī des Indiens et la Cybèle des Phrygiens, et leurs rapports avec la constellation de l’Ourse céleste et celle du Lion placé au-dessous, et auquel préside Cybèle, de manière à pouvoir conclure que si elle n’est pas l’Ourse, elle ne peut être que la Lune d’un mois qui se lie à l’Ourse, soit par son ascension au-dessus de l’horizon lors de la néoménie équinoxiale du Taureau, soit par son passage au méridien dans la néoménie solsticiale qui arrivait dans le Lion, dont cette Lune pût emprunter les attributs, ainsi que ceux du grand Chariot.

Nous n’avons insisté sur cette ressemblance qu’afin de faire voir combien l’étude de la mythologie indienne peut jeter de jour sur celle des Grecs.

La Lune du mois Kārttika, ou du huitième mois indien, est pleine dans le troisième natchtron Krittikā, qui lui donne son nom, ou près des Pléiades. Le jour ou la veille de cette pleine lune commence la fête de Paor-Nomi, ou du neuvième jour. C’est la grande fête du temple de Tirouna-Maley, dans lequel Shiva, dieu aux formes de taureau, descendit en colonne de feu. On allume un grand feu sur le sommet de la montagne où est le temple et on y rend un culte au feu. Si l’on jette un coup d’œil sur notre tableau, on lira pour attribut de ce natchtron : Flamme. Le Soleil est alors dans le Scorpion, où les Chinois marquent grand feu, comme on le voit aussi dans le tableau.

Les adorateurs de Vishnu [166] célèbrent cette pleine lune en allumant des feux dans le temple, les rues sont illuminées et l’on porte ce dieu en procession.

Les adorateurs de Shiva supposent que la colonne de feu dans laquelle descendit ce dieu fut changée bientôt en colonne de terre. Il suffit, pour entendre cette fiction, de savoir que les anciens astrologues casaient les éléments dans les signes et affectaient le feu au Bélier, la terre au Taureau [167] et que la Lune, dans le natchtron Krittikā, tenait au Bélier et au Taureau, ou aux signes de l’élément dit feu et de celui de la terre.

Dans le mois Shrāvana, où le Soleil arrive à la Vierge, le onzième jour, conséquemment lorsque la Lune a atteint le vingt-deuxième natchtron, ou Shrāvana, qui répond à la fin de décembre ou du Capricorne, on célèbre la naissance de Krishna [168]. Son histoire est rapportée plus au long dans nos cosmogonies comparées. On la trouvera dans le Bagawadam [169] et dans les "Recherches Asiatiques" [170].

Avant d’achever cet aperçu très abrégé de notre travail sur les cosmogonies comparées, et en particulier sur celle des Indiens, et après avoir succinctement indiqué la marche que l’on doit suivre dans ces recherches, nous répéterons encore ce que nous avons dit, qu’on doit souvent tenir compte des constellations du Zodiaque et même des paranatellons ou des constellations extra-zodiacales qui, par leur lever et leur coucher, se lient aux douze signes. En voici un exemple par lequel nous terminerons notre mémoire explicatif du tableau.

On trouve dans le Bagawadam [171] une fable sacerdotale sur un déluge qui a tous les caractères d’une fiction astrologique puisqu’elle s’explique sans peine par les aspects astronomiques. Vishnu, ou le dieu conservateur, y prend la forme de poisson, tel que nous l’avons fait dessiner sous le Capricorne, et tel qu’il est représenté dans le Zodiaque indien des "Transactions", an 1 772. C’est le Poisson austral, qui est dans nos sphères à l’extrémité de l’eau du Verseau et qui se replie sous le Capricorne. Le dieu Soleil, ou Vishnu, uni à cette forme céleste vint, dit-on, se placer près d’un prince vertueux qu’il voulait sauver du déluge afin de recommencer un nouvel ordre de choses. Ce prince évidemment est l’homme du Verseau, le fameux Deucalion des Grecs, qui fut également sauvé du déluge à cause de sa vertu. C’est dans ce même signe que les Chinois placent aussi un prince, Chouen-Heu, sous lequel arriva pareillement le déluge [172].

Dans la fiction indienne, ce prince est le septième Menou ou génie tutélaire qui préside à un des âges, comme l’homme du Verseau est le septième signe à partir du solstice d’été, et comme Saturne, la planète qui y a aussi son domicile, est aussi la septième.

Vishnu, sous cette forme, dit à ce prince vertueux qu’il se placera près de lui, et que dès qu’il sera sur l’océan, au milieu des eaux, il verra paraître un grand vaisseau et un serpent aquatique, que ce serpent servira de câble pour tirer le vaisseau en l’attachant à la grande corne du Poisson, dont lui-même Vishnu aura pris la forme [173].

L’inondation commence, la mer franchit ses rivages, la pluie tombe par torrents. On sent bien que c’est ici une allusion au signe dans lequel va entrer le Soleil, ou au Verseau, premier ruthu dans lequel va se renouveler l’année.

Le dieu protecteur aussitôt se montre sur l’océan, sous la forme d’un poisson brillant comme l’or. On ne pouvait mieux désigner un Poisson, constellation qui renferme une étoile de première grandeur, Fomalhaut, ou la brillante étoile de la bouche du Poisson austral. Le dieu poisson se développe dans une immense étendue, avec une corne énorme, à laquelle le prince attache, avec un câble fait d’un grand serpent, un vaisseau qui tout-à-coup se montre à lui. Heureux d’être ainsi sauvé, le prince chante les louanges de Dieu, qui l’a préservé du déluge et qui veut que sous son règne un nouveau monde renaisse.

Toute cette fiction porte sur un aspect astronomique qui annonçait la fin de l’ancienne année ou du dernier âge, et le renouvellement périodique du temps, ou de l’année qui partait du solstice d’hiver, ou du vingt-troisième natchtron, Dhanistha, qui comprend les étoiles de l’eau du Verseau, constellation qui occupait alors le solstice d’hiver et le berceau de l’année renaissante.

Au moment où le Soleil, placé vers l’extrémité de la constellation du Capricorne et sur le Poisson à longue corne, descendait au sein des flots au couchant, le Verseau, aux portes de la nuit, voyait lever l’Hydre de Lerne et le Vaisseau céleste, qui est au-dessous de cet animal aquatique. Il semblait, en se développant, amener le vaisseau sur l’horizon, au bord duquel paraissait sa tête à l’orient, tandis que la corne du Poisson était aussi à l’horizon à l’occident. Il est nécessaire de prendre un globe céleste pour vérifier ces positions. Voilà quelle a été la base assez simple d’un roman astrologique qu’ont répété beaucoup de peuples, en le dépouillant d’une partie de ce qu’il a de merveilleux dans la fable indienne, et en le dénaturant plus ou moins.

C’est cette fable qui a passé chez les Scythes et dont parle Lucien dans son "Traité de la déesse de Syrie". C’est elle que les Grecs ont répétée et qu’Ovide a mise en vers latins chez les Romains. Enfin, elle a été le type de beaucoup de semblables fictions que l’on trouve chez beaucoup d’autres peuples, avec des retranchements qui ont déguisé son origine astronomique. Elle a été connue des Babyloniens et de Bérose [174] qui dit que le déluge arrive quand les planètes, et conséquemment le Soleil, regardé par eux comme planète, se trouvent dans le Capricorne, c’est-à-dire dans le signe où finissait la dernière saison des Indiens et leur année, lorsque le Soleil était uni au Poisson représenté sous le Capricorne avec une grande corne. C’est le Poisson oxyrhynque dont nous avons parlé dans notre grand ouvrage [175], c’est celui qui se trouve dans la Sphère orientale rapportée par Kirker [176]. II y est uni au fleuve du Verseau, que cette sphère appelle le Nil.

On donnait aussi le nom de Menou aux planètes. La septième, ou Saturne, présidait au Capricorne et au Verseau. C’est peut-être ce qui a donné lieu à Alexandre Polyhistor de dire que Saturne avait prévu le déluge et qu’il s’était servi d’un vaisseau pour se sauver de l’inondation, lui et les diverses espèces d’animaux.

On peut voir ce que nous disons dans notre grand ouvrage sur le déluge [177] et rectifier peut-être ce que nous avons pu dire en appliquant exclusivement aux Égyptiens et au débordement du Nil ce qui a pu avoir un autre objet chez d’autres peuples, et se rapporter à l’époque de la fin du temps ou de l’année et à son renouvellement dans l’ancienne constellation du solstice d’hiver, le Verseau.

Nous croyons qu’il suffit de ce petit nombre d’exemples pour apprendre à ceux qui veulent étudier les fables astronomiques, que les anciens nous ont laissées sous le nom de fables sacrées, l’usage qu’ils peuvent faire de la nouvelle clé que nous introduisons dans l’explication de la mythologie, ou plutôt du complément que nous donnons à celle que nous y avons depuis longtemps introduite.

À droite Sopdet et l'étoile Sirius,  à gauche Sah, dont
la couronne représente la ceinture et la dague d'Orion
Si la science ancienne est si peu connue aujourd’hui, c’est que, comme la nature, elle a ses mystères, et qu’on s’est toujours trompé sur son véritable caractère. On s’est persuadé que les anciens savants étaient jaloux, comme ceux de nos jours, d’être entendus, tandis qu’ils mettaient leur gloire à être devinés. Ils savaient que l’homme aime plus encore le merveilleux que le vrai. Ils ont profité de cette disposition de son esprit pour piquer sa curiosité et éveiller son attention.

De là est né l’ingénieux apologue qui instruit sans tromper personne. Il n’en fut pas de même des autres fables. Plus d’une fois nous avons prouvé [178] que des êtres physiques et astronomiques personnifiés sont devenus des hommes et des héros dont les noms sont restés dans les annales des anciens peuples, que des périodes fictives sont entrées souvent dans leur chronologie. Nous ferons voir aujourd’hui comment des images, de purs emblèmes, ont été classées dans l’histoire naturelle et ont été prises pour des animaux réels, tel le Phénix, cet oiseau si fameux par la longue durée de sa vie, par le genre de sa mort et par sa résurrection.

Tacite [179], tout philosophe qu’il était, quand il donnait son opinion, fut quelquefois dupe de celle des autres. Il rejeta, il est vrai, le merveilleux de cette histoire mais il regarda l’existence du Phénix comme incontestable, et d’autres écrivains en ont même admis tout le merveilleux. Comme eux, nous en tiendrons compte aussi mais pour essayer d’en donner l’explication et pour rendre cet oiseau aux fables astronomiques auxquelles il appartient.

Nous avons eu plus d’une fois l'occasion de faire voir que les fables solaires s’étaient reproduites partout sous mille formes. Celle-ci a encore pour objet le Soleil et l’une des plus longues périodes de son mouvement, la période sothiaque ou le cycle caniculaire. L’année religieuse des Égyptiens, n’admettant point l’intercalation d’un jour tous les quatre ans, que nous appelons l'intercalation bissextile, recommençait au bout de quatre années, un jour plus tôt que celle-ci [180]. Ces anticipations d’un jour, venant à se multiplier, produisaient une année entière d’anticipation au bout de 1 460 années bissextiles et les deux commencements d’années alors coïncidaient ensemble, avec cette seule différence que l’on ne comptait que 1 460 années de celles qui avaient des bissextiles et qu’on en comptait 1 461 de celles qui n’en admettaient pas, et que leurs anticipations successives faisaient appeler années vagues. C’est le retour de ces années à leur point primitif qu’on appela période sothiaque, parce que la canicule, appelée Sothis, en ouvrait et en fermait la marche.

À droite Sopdet et l'étoile Sirius, à gauche Sah, dont la couronne représente la ceinture et la dague d'Orion

C’est la durée de cette période, ce sont ses retours éloignés qui ont donné lieu à l’histoire merveilleuse de l’oiseau symbolique qui la représentait dans les temples, comme le dit formellement Synésius, et comme il nous est aisé de nous en convaincre par le rapprochement que nous allons faire des traits qui les caractérisent l’une et l’autre.

Nous avons vu que la période roulait dans un cercle de 1 461 années vagues. C’était aussi dans un cercle de 1 461 années qu’était renfermée la durée périodique de la vie du Phénix, si nous en croyons Tacite [181]. La mesure de l’une était celle de l’autre parce que l’une était la chose et que l’autre en était l’image.

C’était au lever du Soleil que finissait et que recommençait la période. C’était au lever du Soleil qu’on faisait mourir et renaître le Phénix [182].

C’était vers le solstice d’été, à l’époque du débordement du Nil, que la période se renouvelait au lever de la canicule, qui était regardée comme le signe de l’inondation ainsi que du renouvellement de l’année [183]. On prit également le Phénix pour symbole du débordement, comme il l’était de l’année caniculaire [184].

On supposait que, dans ce long cercle d’années, étaient comprises toutes les variations des phénomènes météorologiques et même des événements humains qu’on faisait dépendre des aspects célestes, que l’on croyait se reproduire, à chaque période, dans le même ordre. On attacha la même idée au retour du Phénix, suivant Pline [185].

Horus Apollon, grammairien égyptien, dit également du Phénix qu’en renaissant il amène à sa suite le renouvellement de toutes choses [186]. Jusqu’ici nous voyons donc qu’on n’a rien dit du Phénix qui ne puisse s’appliquer aussi à la période ou à la grande année sothiaque. Cette période était exclusivement consacrée au Soleil, la Lune n’y entrait pour rien. Aussi prenait-elle le nom d’année héliaque, ou d’année solaire par excellence, de grande année et d’année de Dieu ou du Soleil, la grande divinité d’Héliopolis.

Le Phénix était pareillement consacré au Soleil [187] qui, souvent même, prit le nom de Phénix [188]. C’était des lieux où paraissait se lever cet astre pour un Égyptien, qu’il était censé partir pour venir à Héliopolis, ou dans la ville du Soleil, mourir et renaître sur l’autel de ce dieu.

À tant de traits communs qui nous donnent le mot de cette énigme sacrée, ajoutons encore un caractère qui ne peut convenir qu’à un symbole, qu’à un emblème. Ce Phénix qui vivait si longtemps, on ne l’avait jamais vu manger, dit-on, ce qui se conçoit aisément d’une image.

Il est une dernière preuve, qui doit achever de nous convaincre et qui est une conséquence nécessaire de ce que nous venons de dire. Si le Phénix n’est qu’une expression symbolique du cycle caniculaire, si sa mort et sa résurrection sont relatives au Soleil et ne signifient que l’achèvement de l’ancienne période et le commencement d’une nouvelle, il suit de là que le renouvellement de la période et, pour parler un style allégorique, que l’apparition du Phénix ont dû avoir lieu en même temps. C’est ce qui est arrivé.

La période de régénération s’était renouvelée sous le grand Sésostris, prince moins admirable encore par ses conquêtes que par les grands travaux qu’il fit exécuter en Égypte et auxquels il se vantait de n’avoir employé que les bras des vaincus sans qu’il en ait rien coûté à ses Égyptiens. C’est aussi sous ce prince que Tacite place l’époque de l’apparition du Phénix.

Feng Huang, le Phénix chinois
Les meilleurs chronologistes fixent vers l’an 1 322 avant notre ère le règne de Sésostris. C’est aussi dans cette année 1 322 que s’était renouvelée la période sothiaque, qui finit et se renouvela dans les premiers jours du règne du bon Antonin, l’an 138 de notre ère, et qui s’est encore renouvelée une fois l’an 1 598, sous Henri le Grand, deux princes du sang gaulois. Ces trois règnes heureux, que le hasard a placés à la tête de la période, qui devait ramener le bonheur, justifieraient presque l’antique opinion qu’on avait des effets de ce renouvellement, si l’on pouvait encore croire aux rêves de l’astrologie et chercher ailleurs que dans le cœur des princes la source de la félicité publique.

En vain les flatteurs d’Auguste voulurent faire croire que la grande année se renouvellerait sous son règne et ramènerait l’âge d’or, ceux de Tibère que le Phénix avait reparu en Égypte : on ne les crut pas.

Il existe encore aujourd’hui un monument antique par lequel il semble que les Égyptiens ont voulu consacrer la mémoire de cette époque importante de leur chronologie et de leur astronomie. C’est l’obélisque d’Héliopolis, qui a été transporté à Rome sous Constant. L’inscription hiéroglyphique, dont le grammairien Appion n’a traduit que quelques lignes, parle aussi du Phénix. Quoique l’inscription porte le nom de Ramestès, on ne peut douter que le prince ne soit le Ramsès dont parle Tacite et à qui il fait honneur de toutes les conquêtes que l’antiquité attribua à Sésostris. Ce Ramsès avait subjugué par la force de ses armes la Lybie, l’Éthiopie, la Médie, la Perse, la Bactriane, la Scythie, la Syrie, la Cappadoce, la Bithynie, la Lycie et avait jeté les fondements d’un empire aussi puissant qu’était, du temps de Tacite, celui des Romains et des Parthes. Hérodote et Diodore en disent autant de Sésostris. Ils parlent même de sa puissance maritime, de ses nombreuses flottes, de ses conquêtes au-delà du Gange et des colonnes qu’il éleva partout comme autant de monuments de sa puissance et de ses victoires.

L’inscription de l’obélisque peint sous d’aussi grands traits le héros dont elle unit le règne au nom du Phénix. C’est le favori du dieu des combats, c’est le bien-aimé du Soleil, le bienfaiteur de sa patrie et le maître du reste du Monde. Qui ne reconnaîtrait à ces traits le fameux Sésostris, sous qui Tacite place une apparition du Phénix et sous qui, effectivement, se renouvela le grand cycle qui ramenait l’âge d’or ?

Statue du Feng Huang, Palais d'été, Pékin
Il est encore une observation qui n’est pas entièrement à négliger, c’est que, parmi les figures tracées sur l’obélisque, on remarque vers le haut celle d’un oiseau tout à fait semblable à celui dont Hérodote vit l’image et que l’on lui dit être celle du Phénix. Il avait, selon lui, la forme et la taille de l’aigle. C’est aussi celle que lui donnent tous les peuples chez qui nous retrouvons la fiction du Phénix : une touffe de plumes de forme conique parait sa tête. Telle est aussi la figure de l’oiseau représenté vers le haut de l’obélisque. On voit sur sa tête une espèce de mitre conique qui a pu être prise pour une huppe. Au reste, c’est une preuve surabondante que nous ne proposons que comme une conjecture. Nous n’avons pas la présomption de croire que nous entendions cette écriture antique, universelle, indépendante de la diversité des langues et de leurs altérations, et par-là si propre à conserver, propager et rendre universelle la science, et dont malheureusement la clé est perdue sans espoir de la retrouver. Ainsi a été rompu le fil des connaissances humaines dont à peine on aperçoit quelques traces éparses sous les ruines des temples de l’Égypte, qu’il n’est pas donné à tout le monde d’interroger.

La fiction du Phénix, née sur les rives du Nil, a passé, d’un côté, jusqu’en Chine, et de l’autre, jusqu’au milieu des glaces de l’Islande et de la Scandinavie et au Mexique.

Le Phénix égyptien est devenu le Feng Huang des Chinois et il en a conservé les formes car on lui donne aussi la figure de l’aigle, une crête sur la tête et ses plumes offrent les couleurs les plus belles et les plus variées, comme celles du Phénix. Son apparition était aussi regardée comme le signal du bonheur et du règne des bons princes [189]. Cet oiseau merveilleux, au rapport des historiens chinois, ne se montre que très rarement et seulement quand les bons princes occupent le trône. Il parut sous leur quatrième empereur qui, dit-on, gagna l’estime et l’amour de ses peuples par la douceur et par la bonté de son caractère. Aussi l’or fut-il le métal qui représentait ce prince et le Feng Huang ou l’Aigle-Phénix, fut son emblème et l’on en broda l’image sur les habits des grands de l’empire. Cet oiseau était appelé l’oiseau de prospérité et le sceau de l’empire était fait d’une pierre précieuse et rouge, sur laquelle on disait qu’il s’était reposé.

Ces idées de bonheur, les anciens Romains l’attachaient au renouvellement de la période, comme on le voit dans Virgile qui n’a fait que consigner, dans sa quatrième églogue, l’opinion consacrée dans les livres des Sibylles : Redeunt Saturnia regna. On voit donc ici le même préjugé établi dans le Latium et en Chine. Là, c’est le renouvellement de la grande année, ici, c’est l’apparition de l’oiseau Feng Huang qui ramène l’âge du bonheur, ce qui s’explique quand on sait que le Phénix n’est que l’emblème de la grande année qui reproduit les mêmes aspects réputés causes des mêmes effets.

On retrouve encore la fiction du Phénix chez les anciens Suédois [190] mais ils ne l’ont appliquée qu’à l’année commune et au mouvement de déclinaison périodique du Soleil d’un pôle vers l’autre. Ils disaient de leur Phénix que tous les ans il s’éloignait d’eux vers les régions méridionales et jusqu’en Éthiopie, qu’il était suivi dans sa retraite par tous les oiseaux de passage, qu’arrivé là, il se brûlait, après avoir pondu l’œuf qui devait le reproduire, que de cet œuf sortait un petit ver rouge qui reprenait des ailes, et qui, devenu Phénix, dirigeait de nouveau son vol vers le nord en ramenant les oiseaux qui s’en étaient éloignés avec lui. Le sens de cette énigme est trop clair pour qu’il soit nécessaire d’en comparer les traits avec le Soleil, dont le départ les avait affligés et dont la renaissance et le retour étaient célébrés par des chants de joie chez tous les peuples.

Pline et Suidas nous ont conservé la tradition de la métamorphose du Phénix en petit ver.

Saint Épiphane parle même des ailes que reprend ce ver pour redevenir Phénix et pour retourner vers les lieux d’où il était parti.

Cette fiction est reproduite dans l’histoire du Soleil, adoré sous le nom d’Adon ou d’Odin par les anciens Scandinaves. On l’appelle l’aigle et le père des vermisseaux, et le père des années. Cette dernière épithète est celle que l’inscription égyptienne, qui parle du Phénix, donne aussi au Soleil. On suppose qu’Odin, changé en ver, descendit dans une caverne, que là il prit sa forme céleste et que, de suite, métamorphosé en aigle, il revola vers le séjour des dieux. Hercule, ou le Soleil personnifié, se brûle aussi sur un bûcher en Thessalie avant de remonter au séjour des dieux où il épouse Hébé, déesse de la jeunesse. C’est bien encore le Phénix qui se rajeunit.

Le résultat de tout ce que nous venons de dire n’est pas seulement d’avoir l’explication d’une énigme mais plutôt encore une nouvelle preuve du caractère énigmatique de la science ancienne.

"The Great Sphinx and Pyramid of Khafre"
par Nigel Fletcher-Jones sur FlickR
Nous voyons de plus que celle des Égyptiens s’est propagée dans toutes les parties du Monde. Mais à quelle époque ? Comment en suivre la trace ? Combien a-t-il fallu de siècles pour que ces communications des diverses parties du globe entre elles se soient établies ? C’est ce que nous n’examinerons pas ici. Il nous suffit de faire remarquer qu’elle a conservé partout le caractère merveilleux de l’énigme, que ce n’est donc pas sans quelque raison que les dépôts de cette science, renfermés dans les temples de l’Égypte, y furent mis sous la garde du Sphinx, cet emblème ingénieux de la sagesse et de la force unies entre elles dans le gouvernement du Monde, que l’astronomie y joue un grand rôle et que, sans cette clé, la porte des anciens sanctuaires et des archives du temps restera toujours fermée.

Nous finissons en avertissant le lecteur, s’il veut tirer quelque parti de ce tableau, de lire plusieurs fois notre mémoire explicatif et de le comparer dans tous ses détails avec le tableau lui-même, et avec un globe céleste, à pôle mobile, s’il est possible.


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Notes

[1] Varro de ling. latin., lib. 6
[2] Origine des cultes, tom. 3 in-4°, pag. 324, etc.
[3] Ibid., pag.17
[4] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 309
[5] Souciet, tom. 2, pag. 126 et 136
[6] Souciet, tom. 2, part. 2, pag. 6
[7] Idem, ibid., pag. 6, 64, 138
[8] Mich. Glyc., annot., part. 4, p. 248
[9] Uranol. Pétav., tom. 3, chap. 37, pag. 93
[10] Observat. sur le Zodiaque de Dendérah, revue philosophique, mois de mai 1806
[11] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 182, 231
[12] Ibid, tom. 1, pag. 235
[13] Firmic., liv. 8, chap. 31
[14] Firmic., liv. 8, chap. 6
[15] Souciet, tom. 1, pag. 247
[16] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 294
[17] Ibid., pag. 227
[18] Ibid., pag. 229
[19] Ibid., pag. 232
[20] Ibid., pag. 226 et 227
[21] Origine des Cultes, pag. 229
[22] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 123
[23] Origine des Cultes, tom. 3, part. 1, pag. 337
[24] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 191-288
[25] Ibid., pag. 310
[26] Poocke, Voyages de l’East, tome 1,pag. 77
[27] Origine des Cultes, tom. 1, pag. 180
[28] Bailly, Astr. anc. Le Gentil, Voyage aux Indes, t. 1
[29] Souciet, tom. 2, pag. 125
[30] Ibid., pag. 123
[31] Ibid, tom. 2, pag. 125-128
[32] Origine des Cultes, tom. 3, part. 1, pag. 162, etc.
[33] Anquetil, Zend., Avest., tom. 1, pag. 335
[34] Souciet, tom. 2, pag. 90
[35] Idem, tom. 3, pag. 129
[36] Souciet, tom. 3, pag. 132
[37] Rech. Asiat., tom. 2, pag. 340, pl. 7
[38] Chardin., tom. 2, pag. 119, in-4°
[39] Manuscrit arabe, n° 1165
[40] Souciet, tom. 2, pag. 128
[41] Pag. 8
[42] L. 1, c. 9
[43] Rech. Asiat., trad., tom. 2, pag. 311 et 43a
[44] Origine des Cultes, tom. 3, part. 1, pag. 324, édit. In-4°
[45] Revue philosophique. Mai 1806
[46] Recherc. Asiat., trad., tom. 2, pag. 433
[47] Recherc. Asiat., tom. 2, pag. 169, traduct.
[48] Ibid., pag. 132
[49] Anquetil, Oupnek’hat, tom. 1, pag. 291-293
[50] Origine des Cultes, tom. 2, part. 2, pag. 205
[51] Anquetil, Zend., Avest. Tom. 2, part. 2, pag. 357
[52] Anquetil, Zend., Avest. Tom. 2, part. 2, pag. 357
[53] Anquetil, Zend., Avest. Tom. 2, part. 2, pag. 400
[54] Recherc. Asiat., trad., tom. 2, pag. 311
[55] Edda Smund., Stroph. 26, Mallet, hist. De Dan., tom. 1, ch. 13, pag. 33
[56] Oupnek’hat., tom. 1, pag. 334
[57] Ibid., pag. 334 et Annal., pag. 612
[58] Souciet, tom. 3, pag. 72
[59] Hérod., liv. 2, chap. 121
[60] Uranol. Pétav., tom. 3, ch. 23, pag. 85
[61] Le Gentil, Voyage de l’Inde, pag. 180, etc.
[62] Rech. Asiat., tom. 2, pag. 432
[63] Origine des cultes, tom. 3, part. 1, pag. 336
[64] Firmic.
[65] Le Gentil, Voyage de l’Inde, pag. 41
[66] Ibid., pag. 42
[67] Ibid., pag. 218
[68] Ibid., pag. 242
[69] Voyage de l’Inde, t. 1, pag. 311
[70] Ibid., pag. 321
[71] Bailly, Astr. anc., pag. 46, etc.
[72] Hist. De Juifs, liv. 1, chap. 2, v. 9
[73] Bailly, Astr. anc., pag. 335, Éclairc.
[74] Ibid., pag. 13
[75] Origine des cultes, tom. 3, pag. 163, etc.
[76] Origine des cultes, tom. 3, pag. 331, 345, 352
[77] Bailly, Astr. anc., pag. 44
[78] Rech. Asiat., trad., tom. 2, pag. 332
[79] Ibid., pag. 346
[80] Ibid., pag. 499
[81] Vitr., liv. 9, chap. 67
[82] Gen., chap. 1
[83] Revue philosop., mai 1806
[84] Mém. Sur la Chin., tom. 13, pag. 331
[85] Lord McCart., tom. 4, pag. 129
[86] Souciet, tom. 2, pag. 103
[87] Ibid., pag. 147
[88] Ibid., pag. 64
[89] Souciet, tom. 2, pag. 138
[90] Ibid., pag. 7
[91] Ibid., pag. 64
[92] Ibid., pag. 30
[93] Bailly, Astr. anc., pag. 20, not.
[94] Ibid., pag. 13 et 119
[95] Souciet, tom. 3, pag. 13
[96] Ibid., pag. 30
[97] Ibid., tom. 1, pag. 18
[98] Ibid., tom. 3, pag. 47
[99] Ibid., tom. 2, pag. 103
[100] Origine des cultes, tom. 3, part. 1, pag. 42, etc.
[101] Origine des cultes, Ibid., pag. 44
[102] Chardin., tom. 3, ch. 9, pag. 165
[103] Astr. anc., ch. 1, pag. 480
[104] Astr. anc., pag. 481
[105] Bailly, Astr. anc., pag. 128
[106] Anquetil, Zend., Avest. Tom. 2
[107] Plut. in Tim.
[108] Origine des cultes, tom. 1 et 2, pag. 2
[109] Plin., liv. 18, ch. 25
[110] Bailly, Astr. anc., pag. 477
[111] Bailly, pag. 477
[112] Ibid., pag. 11
[113] Bailly, pag. 477 Calendrier des Ptolémée de Appar. Origine des cultes, tom. 3, part. 3, pag. 274 et Pétav. Uranol., tom. 3, pag. 99
[114] Bailly, pag. 477
[115] Origine des cultes, tom. 3, part. 2, pag. 39
[116] Bailly, pag. 356
[117] Transact. Philosoph., n° 158, année 1694, abrégé, t. 1, p. 251
[118] Astr. anc., part. 11, pag. 402 et 403
[119] Origine des cultes, tom. 3, part. 2, pag. 272
[120] Uranol. Pétav., tom. 3, pag. 98
[121] Ibid. Hipp., liv. 2, ch. 3, pag. 119
[122] Bailly, pag. 397
[123] Ibid., part 11, pag. 398
[124] Synes. Dio., pag. 49
[125] Descript. des Merveilles de l’Égypte, trad. De Vatier, pag. 35
[126] Bailly, pag. 481
[127] Théon., pag. 122 et 123
[128] Ci-dess., pag. 33
[129] Rech. Asiat., tom. 2, traduct., pag. 340
[130] Ci-dess. Pag. 20
[131] Ci-dess. pag. 55
[132] Ci-dess. pag. 38
[133] Rech. Asiat., tom. 2, pag. 181, etc.
[134] Bagawad., liv. 5, pag. 147 ; liv. 9, pag. 169 ; liv. 12, pag. 324
[135] Rech. Asiat., tom. 2, pag. 442
[136 Jamblich., ch. 37 de myster.
[137 Rech. Asiat., tom. 2, pag. 433
[138 Ibid., tom. 2, pag. 34
[139] Kirk. Œdip., tom. 2, part. 2, pag. 242
[140] Rech. Asiat., tom. 2, pag. 233, trad. In-4°
[141] Ibid., pag. 337
[142] Eustathe, Iliad., v. 633
[143] Origine des cultes, tom. 3, part. 2, pag. 35
[144] Hyd. Comm. ad Ulug-Beigh, pag. 31-33
[145] Oper. et Dies, v. 303
[146] Saturnal, liv. 1, ch. 19, pag. 233 et 154
[147] Origine des Cultes, tom. 3, part, 2, pag. 33
[148] Porphyr. de Antr. Nymph., p. 124
[149] Origine des Cultes, tom. 2, part. 8, pag. 105, etc.
[150] Ibid., tom. 3, part. 2, pag. 97, etc.
[151] Natal. Comes., liv. 4, pag. 316
[152] Origine des Cultes, tom. 3, part. 2, pag. 114, etc.
[153] Rech. Asiat., tom. 1, pag. 195
[154] Ci-dessus, pag. 7.
[155] Manuscrit, Biblioth., n° 18. Pouranand du Poisson
[156] Plutar.,T. 2, p. 941
[157] Kirk. Œdip., tom. 2, part. 2, pag. 256
[158] Sonnerat, tom. 2, pag. 85
[159] Diod., liv. 4, ch. 32
[160] Cic. in Verrem de Sig., ch. 44 ; et de Supplic., ch. 72
[161] Strab., liv. 13, pag. 575
[162] Dionys. Perieget, v. 809. Plut., tom. 1 Vit Marcell., pag. 309
[163] Chron. Pasch., pag. 261
[164] Porphyr. de Antr. Nymph.
[165] Système des Brachm., pag. 99. Rech. Asiat., tom. 1, pag. 187
[166] Rech. Asiat., tom. 1, pag. 83
[167] Origine des Cultes, tom. 1, pag. 198
[168] Niebhur, tom. 2, pag. 21-23
[169] Bagawad., liv. 10, pag. 271, etc.
[170] Rech. Asiat., trad., tom. 1, pag. 178, etc.
[171] Trad. des Rech. Asiat., t. 1, p. 170, etc. Bagawad., trad. d'Obsonville
[172] Souciet, tom. 3, pag. 33
[173] Ibid., pag. 173
[174] Sénec. quœs-nat., liv. 3, ch. 29, pag. 739
[175] Origine des Cultes, tom. 2 , ch. 17, pag. 227
[176] Œdip., tom., part. 2 , pag. 201
[177] Œdip., tom. 3, part. 1 , pag. 180, etc.
[178] Origine des Cultes, tom. 1 , liv. 3
[179] Tacit. Annal., liv. 6, ch. 28
[180] Censorin, de Die nat., ch. 18, pag. 107
[181] Tacit. Annal., liv. 6, ch. 28
[182] Hor. Apoll., liv. 2, ch. 54
[183] Porphyr. de Antr. Nymph., pag. 264
[184] Ibid., liv. 1, ch. 32
[185] Plin., liv. 10, ch. 2
[186] Hor. Apoll., liv. 2, ch. 54
[187] Tacit. Annal., liv. 6, ch. 28
[188] Nonnus Dionys., lib. 40, v. 401
[189] Du Halde, tom. 1, pag. 279, tom. 2, pag. 13
[190] Olaüs Rudb., tom. 2, pag. 245

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